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La politique monétaire européenne au milieu du gué !


Les décisions de la Banque centrale européenne le 22 janvier de procéder à un « programme étendu d’achats d’actifs », et le 5 février de suspendre « la dérogation relative aux exigences minimales de notation du crédit dont bénéficiaient les instruments émis ou garantis par la République hellénique » traduisent l’importance prise par la BCE.

Après la suprématie acquise par le dollar, un vent de libéralisme souffle sur les USA. Le 15 août 1971, le président Richard Nixon déclare la fin de la convertibilité du dollar en or. Cette situation oblige l’Europe à inventer son propre système de stabilisation des changes.

Les initiatives monétaires se succèdent alors dont la création du Système monétaire européen en 1979. Puis, deux crises de change en 1992 et 1993 – la livre sterling sort d’ailleurs du SME en septembre 1992 – contraignent à l’élargissement des marges de fluctuation des monnaies à plus ou moins 15 % afin de calmer la spéculation.

Au cours de cette période, les rapports d’experts visant à une plus grande intégration monétaire se multiplient. Le plus décisif fut celui de Jacques Delors (1989) qui prévoit de réaliser la monnaie unique en trois étapes. Les volontés de quelques visionnaires européens (Delors, Mitterrand, Kohl) se conjuguèrent alors pour créer la monnaie unique.

Malgré ses difficultés de conception, l’euro est un indéniable succès. Il rassemble aujourd’hui 19 pays sur les 28 États membres de l’UE. À terme, tous les pays de l’UE sont susceptibles d’utiliser l’euro à l’exception du Royaume-Uni et du Danemark, et de la Suède pour d’autres raisons.

L’euro est la deuxième monnaie de réserve derrière le dollar à fin 2013. Il représentait 24,4 % des réserves internationales de change. La politique monétaire européenne a permis de lutter contre l’inflation. Elle a évité que des soubresauts monétaires ne se produisent. Mais la politique de bas taux d’intérêt n’a pas apporté de solution à la divergence et à l’hétérogénéité des économies.

Mario Draghi, gouverneur de la BCE. (photo DR)

130 banques sous surveillance

Les attentes à l’égard de la BCE sont parfois contradictoires. Tantôt son indépendance et ses objectifs font l’objet de critiques. Tantôt ses interventions « non conventionnelles » sont saluées. Le taux refi (taux de refinancement : le taux principal que les banques doivent payer lorsqu’elles empruntent de l’argent à la BCE) est de 0,050 % (à compter du 4 septembre 2014). Ce taux est extrêmement bas et ne constitue pourtant pas la clé pour la relance du crédit par les banques.
Si le canal des taux de transmission de la politique monétaire ne fonctionne pas bien, d’autres mesures sont utilisées. Les « mesures non conventionnelles » consistent à augmenter massivement la quantité de monnaie en circulation dans l’économie ou à débloquer les marchés de crédit en achetant directement des titres afin de peser sur les primes de risque.

Cette politique a été initiée en 2010 avec le rachat de titres de dette souveraine des États membres de l’UE en difficulté (Grèce, Irlande) sur le marché secondaire (celui des titres déjà émis). L’objectif recherché est de faire repartir dans la zone euro la distribution du crédit bancaire quasiment en reflux depuis 2009.

La nouvelle opération annoncée le 22 janvier 2015 prévoit « un programme étendu d’achats d’actifs » de 60 milliards par mois, jusqu’en septembre 2016, soit un total de 1 140 milliards d’euros. L’objectif poursuivi est de faire que les banques se défassent de leurs titres publics en garanties pour là aussi faire du crédit aux entreprises. Dans tous ces cas la politique monétaire de la BCE s’oriente vers le développement du crédit par les banques.

La BCE ne reste donc pas inerte. Elle a même tendance à accroître ses prérogatives au travers de son implication dans les plans de soutien et la surveillance des 130 plus grandes banques de la zone euro.

Jean-Pierre Moussy