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Les musulmans de France, ces inconnus


L’islam, comme toutes les religions, est traversé par des courants différents. La méconnaissance des musulmans dans notre pays accentue leur stigmatisation. L’instrumentalisation de cette religion par des terroristes, le traitement médiatique et le communautarisme sont sources de peurs. Voici, à partir de spécialistes, quelques clefs pour comprendre.

La méconnaissance de cette religion et les idées reçues sur les personnes dites d’origine étrangère sont un facteur de rejet et de racisme. Un phénomène accentué par la crise, les déclarations de certains responsables politiques, le traitement médiatique spectaculaire et manichéen des conflits internationaux. On ne peut pas cependant occulter les éléments qui alimentent les peurs ou les rejets : le communautarisme, la distinction vestimentaire et alimentaire, la place de la femme, les jeunes qui partent en Syrie.

L’intégration, malgré les discriminations est une réalité

Olivier Roy, politologue et spécialiste de l’islam (1), apporte un éclairage méconnu sur la situation des musulmans dans notre pays. Pour le chercheur, il y a une population musulmane et non une communauté musulmane. De plus, les musulmans français sont bien plus intégrés qu’on ne le dit. « La France réussit mieux l’intégration que ses voisins. Les mariages mixtes sont en hausse. Il y a statistiquement plus de musulmans dans l’armée, la police et la gendarmerie que dans les réseaux Al-Qaïda, sans parler de l’administration, des hôpitaux, du barreau, de l’enseignement. » Quant à la radicalisation, « elle ne concerne que des marges de cette population ». Le terrorisme ? : « Il est condamné par les organisations musulmanes. Les jeunes radicalisés sont en fait en rupture tant avec l’islam de leurs parents qu’avec les cultures des sociétés musulmanes. Certes, l’intégrisme religieux est une réalité chez les musulmans, les juifs ou les chrétiens ». Ce fondamentalisme est pour Olivier Roy « une conséquence de la crise de la culture, une “quête” du pur religieux et non une protestation identitaire ». Ce dernier point est controversé.
Quelle que soit notre perception de l’islam et des personnes dites de culture musulmane, croyantes ou pas, force est de constater que pour la CFDT l’intégration a encore du chemin à faire. Les discriminations à l’embauche, au travail, dans la cité sont flagrantes.

Autres idées reçues sur cette religion

À partir du Coran et de l’islam pour les nuls, Malek Chebel, anthropologue des religions (2), démonte les clichés. Extraits : « Le livre de “foi et de paix” qu’est le Coran est un livre de plénitude et de miséricorde […]. Le djihad signifie avant tout “un effort sur soi”, un combat intérieur pour le bien et contre le mal, et non la guerre sainte comme le prônent les terroristes aujourd’hui […] ». Vis-à-vis des incroyants et des autres religions : « Le Coran appelle les musulmans à traiter les incroyants pacifiques avec justice et bonté. Enfin, le Coran considère les femmes comme complètement égales aux hommes aux yeux de Dieu. » Dounia Bouzar, anthropologue du fait religieux (3), s’attaque aux « dérives sectaires qui défigurent l’islam » accentuées par les préjugés négatifs sur l’islam. Elle explique le danger de transformer une religion en idéologie.
Autre méconnaissance, la confusion et les amalgames sont courants entre islam et islamisme, ils font le jeu des terroristes. L’islamisme est l’instrumentalisation de l’islam à des fins politiques. Le dialogue interculturel et interreligieux ne peut que faire progresser la perception des citoyens et la laïcité. Comme l’écrit le philosophe Abdennour Bidar (4) : « La France et l’islam sont une chance l’un pour l’autre. »

Jacques Rastoul

(1) La Peur de l’islam, Olivier Roy, coédition Le Monde-L’aube, 11 €.
(2) Le Coran pour les nuls et L’islam pour les nuls, Malek Chebel, éditions First, 12 €.
(3) Désamorcer l’islam radical, Dounia Bouzar, Éditions de l’Atelier, 20 €.
(4) Plaidoyer pour la fraternité, Abdennour Bidar, éditions Albin Michel, 6 €.