57 Droits à la retraite acquis dans l’espace européen
Tout État membre de l'Union européenne dans lequel une personne a été assurée verse une pension de retraite lorsque l'intéressé atteint l'âge de la retraite. Cette règle européenne s'inscrit dans la volonté de favoriser la libre circulation des travailleurs (garantie par traité). À cet effet, l'Union européenne s'est dotée de règlements qui rendent compatibles les régimes de sécurité sociale des différents États membres. Ces règlements s'appliquent aux 28 États membres de l'Union, aux 3 États de l'espace économique européen (Islande, Liechtenstein, Norvège) et à la Suisse. Ils couvrent tous les domaines de la protection sociale.
Bon à savoirOù déposer sa demande de validation ?
Vous voulez valider une période de travail donnant droit à la retraite ?
Si vous résidez en France, adressez-vous à votre caisse de retraite (assurance retraite, MSA, régime spécial...).
Si vous résidez dans un pays de l’EEE (espace économique européen) et de l’UE (union européenne) ou dans un pays ayant signé une convention avec la France, la demande est à faire auprès de la caisse de retraite du pays de résidence.
Si vous résidez dans un pays non signataire d’un accord avec la France, rapprochez-vous de la caisse française où vous avez cotisé en dernier lieu (Cnav, Carsat, CGSS, MSA).
C’est la réponse de chaque pays sur le formulaire européen qui sera prise en comte par chaque pays pour le calcul de la retraite. Y compris pour la Grande-Bretagne pour les périodes avant le Brexit.
1. La coordination européenne de la retraite
Les règlements communautaires visent à coordonner les législations de sécurité sociale aux ressortissants des pays de l’Union européenne et aux ressortissants de pays tiers résidant légalement dans l’Union européenne.
La base de cette coordination repose d’abord sur les règlements 1408-71 du 14 juin 1971, 574-72 du 21 mars 1972, 859-2003 du 14 mai 2003. Le règlement 883-2004 du 29 avril 2004 a été adopté par le Conseil des ministres de l’Union européenne, après passage au Parlement en juillet 2009. Le règlement 883-2004 intègre les documents précédents et devient la base de la réglementation européenne en la matière. Il est modifié et complété par les règlements 987-2009 et 988-2009, qui fixent les modalités d’application et déterminent le contenu des annexes. Le 883-2004 est entré en vigueur en mai 2010.
Ces règlements ont été appliqués (avec quelques aménagements ponctuels) aux différents pays, au fur et à mesure de leur adhésion à l’UE.
En janvier 1994, avec la création de l’Espace économique européen (EEE), la réglementation a été étendue à la Norvège, l’Islande et le Liechtenstein (pays non-membres de l’Union Européenne) et, depuis juin 2002, à la Suisse, en vertu d’un accord bilatéral conclu entre ce pays et l’Union européenne.
Ainsi, ces règlements se substituent, sous certaines réserves, à toute convention de sécurité sociale liant soit deux ou plusieurs États membres, soit au moins deux États membres et un ou plusieurs autres pays.
Bon à savoirNouveau règlement européen
Le règlement d’application 883-2004, complété et modifié par le 988-2009 en octobre 2009, s’applique depuis mai 2010.
Parmi des améliorations apportées par ces nouveaux règlements, on peut noter, par exemple :
– la portabilité de la préretraite : il n’est plus nécessaire de garder une résidence dans l’État d’origine ;
– simplification et systématisation des échanges électroniques entre les institutions de sécurité sociale (accélération des procédures) ;
– amélioration et centralisation de l’information en matière de droit à pension des salariés ;
– meilleure coopération entre les institutions ;
– application provisoire d’une législation ou l’octroi provisoire de prestations, afin d’éviter de trop longs délais d’attente de versement des prestations.
2. Les bénéficiaires de la coordination européenne
Cette réglementation s’applique aux ressortissants des États appliquant l’accord, ceux de l’espace économique Européen (EEE) et à la Suisse.
Sont concernés par cette réglementation européenne :
- tous les travailleurs qui sont ou ont été soumis à la législation de l’un ou de plusieurs États membres et qui sont ressortissants de l’un de ces États, apatrides ou réfugiés résidant sur le territoire de l’un des États membres ;
- les conjoints survivants des travailleurs qui ont été soumis à la législation d’un État membre, quelle que soit leur nationalité quand le défunt était ressortissant de l’un des États membres ; réfugié, apatride ou ressortissant des pays de l’EEE ou de la Suisse, quelle que soit la nationalité du défunt lorsqu’ils sont eux-mêmes ressortissants de l’un des États membres ; réfugiés, apatrides ou ressortissants des pays de l’EEE ou de la Suisse ;
- les travailleurs non-salariés par extension depuis juillet 1992 ;
- les fonctionnaires et assimilés (règlement 1606-98 du 29 juin 1998) ;
- les étudiants (règlement 307-1999 du 8 février 1999) ;
- les titulaires de pensions, même s’ils avaient déjà été pensionnés avant que leur pays n’adhère à l’Union européenne ou à l’Espace économique européen, y compris la Suisse ;
- les membres des familles et les survivants des personnes ci-dessus mentionnées, quelle que soit leur nationalité ;
- les ressortissants de pays tiers.
Depuis janvier 2011, le règlement communautaire 1231/2010 a étendu les dispositions des textes en vigueur (883/2004 et 987/2009) aux ressortissants de pays tiers qui se déplacent au sein de l’UE et qui ne sont pas déjà couverts par ces règlements, ainsi qu’aux membres de leur famille, s’ils résident légalement sur un territoire d’un État membre.
Cela permet notamment aux ressortissants de pays tiers de bénéficier de la coordination des législations de sécurité sociale, s’ils se déplacent dans l’Union européenne. La circulaire Cnav 2011-62 du 19 août 2011 précise les conditions d’application de cette mesure.
Il convient de noter toutefois que le Royaume-Uni continuera de leur appliquer les règlements 1408/71 et 574/72. Et que le Danemark, l’Islande, le Liechtenstein, la Norvège et la Suisse, qui n’appliquaient déjà pas le règlement 859/2003 étendant le bénéfice du règlement 1408/71 aux ressortissants des États tiers, n’appliquent donc pas le règlement 1231/2010.
Bon à savoirFamille
Le statut de « membre de la famille » est, en principe, défini dans la législation de l’État de résidence.
3. Règles générales pour les droits propres
La coordination implique la liquidation simultanée des droits au regard des divers pays, sauf si l’assuré ne la désire pas tout de suite ou s’il ne réunit pas encore les conditions requises pour en bénéficier dans les États membres.
Totalisation des périodes validées. Pour déterminer le taux de liquidation dans un État membre, sont retenus tous les trimestres accomplis sous la législation de n’importe quel État membre. Cependant, les périodes accomplies sur le territoire de différents États ne doivent pas, en principe, se superposer.
Attention !Cumul impossible
Le cumul d’une assurance obligatoire dans un État avec une assurance volontaire dans un autre État n’est pas possible.
En matière de pension, les règlements prévoient l’impossibilité de verser une pension totale inférieure à la pension minimale du pays de résidence si l’assuré respecte les conditions requises. D’autre part, les faits ou les événements se produisant dans un État soumis à la coordination doivent être pris en considération par un autre État membre, comme s’ils avaient eu lieu sur son propre territoire.
Par ailleurs, il est possible de valider une période de service militaire, de guerre ou de service civil en France, dès lors que le travailleur a cotisé dans un État de l’Union européenne ou de l’EEE, avant son incorporation. De même, un travailleur au chômage résidant sur le territoire d’un autre État membre peut, sous certaines conditions, bénéficier des prestations chômage de son pays de résidence.
Calcul des prestations. En application des règlements communautaires, un double calcul de la retraite est effectué. On doit comparer la retraite calculée en fonction de la seule carrière en France avec la part à la charge du régime de la pension communautaire, qui prend en compte toutes les activités dans les États membres de l’EEE. C’est le montant le plus élevé qui est servi.
Il faut noter que selon les principes retenus, ne sont pris en compte que les pays dont l’unicité de législation est applicable. C’est-à-dire lorsque les méthodes de calcul de pension de vieillesse sont équivalentes à celles utilisées par le régime général français. Les régimes étrangers sont retenus en fonction de leur base de calcul (régimes ayant recours à une méthode de calcul prenant en compte des salaires pour le calcul de la pension sur une durée d’assurance d’au moins 15 années civiles.
Bon à savoirLiquidation par étapes
La pension servie fera l’objet d’un nouveau calcul, au fur et à mesure que les droits seront acquis dans les autres États, en fonction de la situation du bénéficiaire et de la législation française en vigueur à cette date.
Exemple : Un assuré a validé 100 trimestres en France, 25 trimestres en Allemagne et 30 trimestres aux Pays-Bas, il totalise 155 trimestres. Mais seulement 125 trimestres seront retenus pour l’application du mécanisme de proratisation. Les 30 trimestres validés aux Pays-Bas ne sont pas retenus pour ce mécanisme, car la pension aux Pays-Bas est forfaitaire et n’est soumise qu’à une condition de résidence. Ces trimestres entrent cependant dans le décompte des durées pour le calcul de la pension communautaire. Le tableau 1 donne une vision de ce dispositif.
Ainsi, lorsqu’un salarié demande sa retraite en France, même si son droit à la retraite n’est pas ouvert dans un autre État membre, cette retraite est servie. La fraction proratisée de la pension du régime français est portée, éventuellement, au montant minimum des avantages vieillesse réduit au prorata temporis.
La majoration pour enfants est égale à 10 % de la fraction de pension versée. La majoration pour tierce personne est réduite au prorata temporis.
Dans le cas d’une assurance volontaire, le montant de la majoration s’ajoute à la pension proratisée.
La retraite de base française se calculant avec un liquidation unique pour ceux nés après 1953 (régime général des salariés, des indépendants et des salariés agricoles), il y a un seul salaire ou revenu annuel moyen à comparer avec la pension communautaire.
Bon à savoirPension d’invalidité
La pension d’invalidité continue à être versée lorsque le titulaire d’une pension d’invalidité servie par un État remplit les conditions pour avoir droit à une prestation vieillesse d’un autre État. Le cumul prend fin lorsque la pension d’invalidité est transformée en pension vieillesse.
Tableau 1
Régimes d’assurance-retraite reconnus équivalents
Concerne la proratisation du Salaire annuel moyen lors du calcul de la pension communautaire (point 3).
États | Régime des salariés | Régime des non-salariés | Régime des Fonctionnaires |
Allemagne | Oui (1) | Non | |
Autriche | Oui | Oui | Non |
Belgique | Oui | Oui | Non |
Bulgarie | Non | ||
Chypre | Oui | Oui | n.d. |
Croatie | Oui | ||
Danemark | Non | ||
Espagne | Oui | Non | |
Estonie | Oui | ||
Finlande | Non | ||
Grèce | Non | - | n.d. |
Hongrie | Oui | Non | Non |
Irlande | Non | ||
Islande | Non | ||
Italie ancien système | Non | ||
Italie nouveau système | Oui (2) | ||
Lettonie | Non | ||
Lichtenstein | Oui | n.d. | |
Lituanie | Non | ||
Luxembourg | Oui | n.d. | |
Malte | Non | ||
Norvège | Non | ||
Pays-Bas | Non | ||
Pologne ancien système | Non | ||
Pologne nouveau système | Oui (3) | ||
Portugal | oui | Oui | n.d. |
République tchèque | Oui | ||
Roumanie | Oui | Oui | n.d. |
Royaume-Uni | Non | n.d. | |
Slovaquie | Oui | Oui | n.d. |
Slovénie | Oui | ||
Suède | Oui | ||
Suisse | Oui |
(1) Allemagne : à l’exception des professions libérales qui ont des régimes en capitalisation hors champ de la sécurité sociale allemande.
(2) Italie : coexistence de deux systèmes depuis 1996, date à laquelle toutes les personnes embauchées ont une pension calculée sur la base du nouveau système contributif. Les personnes qui justifient d’une ancienneté inférieure à 18 ans au 31 décembre 1995 bénéficieront des deux systèmes, et leurs périodes travaillées à compter du 1er janvier 1996 sont reconnues équivalents.
(3) Pologne : deux régimes sont appliqués. L’ancien régime aux personnes âgées de plus de 50 ans à la date du 1er janvier 1999 (système par répartition à prestation définie) et le nouveau régime aux personnes âgées de moins de 50 ans à la même date au titre duquel l’équivalence est reconnue.
4. Les retraites complémentaires
Depuis 2000, l’Arrco et l’Agirc font partie du champ d’application de la réglementation européenne en étant considérés comme faisant partie du premier étage de la retraite. Les règles sont alignées sur celles du régime de base (régime général). De ce fait, les salariés détachés à l’étranger par une entreprise située en France, soit au titre du règlement de l’UE, soit en application d’une convention bilatérale et maintenus, à ce titre, au régime général, sont affiliés obligatoirement aux caisses Arrco et Agirc.
À l’inverse, s’ils sont détachés en France par une entreprise étrangère et dispensés d’assujettissement à la sécurité sociale, ils ne sont pas affiliés aux régimes complémentaires. Cette nouvelle réglementation conduit à rendre caducs les accords collectifs prévoyant des extensions territoriales. Ils sont, de ce fait, supprimés. Les salariés devront adhérer individuellement à une assurance facultative continuée au sens des règlements européens.
Des adaptations ont été mises en place pour garantir le droit à la retraite à 60 ans sans abattement, pour ceux qui terminent leur carrière dans un des États membres, grâce à la mise en place d’équivalences de situation.
La demande est à effectuer dans le pays de résidence ; elle est unique. Cette demande est adressée au régime de base français, puis transmise aux régimes complémentaires. Pour les régimes Arrco et Agirc, c’est le service Arrco des résidents hors de France qui gère le dossier.