UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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70 ans de liberté et d’engagement


« 70 ans » ne veut plus rien dire ! S’ils s’attendaient à une rétrospective, les historiens auront sans doute été déçus. Durant cette journée où la CFDT Retraités a fêté ses 70 ans, les verbes à l’imparfait ont été rares. Le présent et l’avenir ont été au cœur de l’événement. Avec une certaine impatience et une urgence soulignées !

Si l’Histoire marque les hommes et les femmes, les femmes et les hommes savent construire l’Histoire. Fin décembre 2015, pour la première fois en France, le nombre de personnes de plus de 60 ans a dépassé le nombre de personnes de moins de 20 ans. Quelle société allons-nous contribuer à inventer ? Tout l’enjeu de cette manifestation des 70 ans était là. Et Pascale Boistard, secrétaire d’État chargée des personnes âgées pouvait légitimement saluer « la forte implication de l’Union confédérale des Retraités CFDT dans l’élaboration de la loi d’adaptation de la société au vieillissement ».

Révolutionnaires et pionniers

Pour Serge Guérin, il est urgent de prendre en compte cette révolution démographique. Le sociologue plaide pour un rajeunissement du regard sur le vieillissement. Le vieillissement est une opportunité pour changer nos comportements. Il y a là un levier majeur de développement économique, pour créer des emplois pour les plus jeunes et développer un nouveau mode de vie sociale. « Ces personnes, qui ne travaillent pas officiellement, mais qui sont actives, qui contribuent au lien social, au tissu associatif, qui représentent la moitié des aidants, ont un apport social majeur. Comment prendre conscience que l’engagement des retraités – mais de tous les autres également – construit une société, non plus simplement fondée sur le travail mais sur l’activité ? Les personnes, qui sont dans cet acte-là, sont, sans le savoir, des révolutionnaires de cette nouvelle société. Vous êtes intrinsèquement des révolutionnaires, réformistes, modérés. »
Et Serge d’enfoncer le clou : « Le fait de vivre plus longtemps nous permet aussi d’innover plus longtemps. Le vieillissement est une manifestation concrète contre l’obsolescence programmée ! »

Pacte intergénérationnel

Luc Broussy, auteur du rapport interministériel sur l’adaptation de la société au vieillissement et président de France Silver Éco, traduit ces enjeux sur le terrain politique. À la fin du XXe siècle, notre société a dû répondre en créant l’Apa, en triplant le budget d’action sociale des personnes âgées… Que faire de plus ?
« C’est là qu’est né ce concept de loi d’adaptation de la société au vieillissement. Désormais, les seniors veulent maîtriser leur destin. Ils n’iront en maison de retraite que s’ils le veulent. S’ils ne le veulent pas, il faut des stratégies alternatives », analyse Luc Broussy.
De fait, nous n’avons pas anticipé l’explosion du nombre de personnes très âgées mais valides qui auront besoin de lien social, de mobilité dans la ville, d’un logement adapté alors que 75 % des seniors sont propriétaires d’un logement qui se révèle… inadapté. De ce logement aux nouvelles régions en passant par le quartier et par la ville, les politiques d’aménagement vont être cruciales. Et Luc Broussy de marquer sa volonté : « Le véritable pacte intergénérationnel d’aujourd’hui est de voir des jeunes de 25 ans sortir demain de l’école, de créer des start-up pour aider les personnes âgées à trouver des solutions à leurs problèmes. »

Une vigie qui explore

En quoi, face à ces mutations, les hommes et les femmes peuvent-ils construire leur propre histoire ? En quoi la CFDT Retraités, ses adhérents, ses militants peuvent-ils au sein de la CFDT tout entière faire pleinement société ? Selon Georges Ubbiali, maître de conférences en sociologie à l’université de Bourgogne, l’élément décisif à l’adhésion à la CFDT Retraités est que l’UCR pratique un syndicalisme qui place la revendication, l’aspiration à une citoyenneté au cœur de la cité. « On retrouve les questions centrales des retraités : la santé, les revenus. Mais de plus en plus apparaissent des préoccupations autour du logement, la mobilité… Ce type de syndicalisme défend la position d’un salarié qui s’approche d’un usager citoyen… Et cela intéresse fortement celles et ceux qui se retrouvent impliqués dans ce syndicalisme. Le syndicalisme Retraités est un peu une vigie, parce qu’il explore des pistes, des thématiques beaucoup moins fréquentées par les revendications plus traditionnelles des salariés. »

Le sens et les valeurs

Gilbert Jérôme enfonce le clou : « Nous devons avoir la capacité de présenter des revendications à la fois crédibles et mobilisatrices. Et tenir l’autre bout de la chaîne, celle d’être plus nombreux, plus forts. Nous devons maintenir ce type de syndicalisme d’engagement pour être reconnus et nous développer. »
Le secrétaire général adjoint de l’UCR le reconnaît, le problème est la perception au moment du passage à la retraite. Autant cette rupture est accueillie favorablement par le salarié, autant elle est aussi liée avec le syndicat. « Ce n’est pas évident d’être syndiqué une fois à la retraite ! Beaucoup de personnes ignorent jusqu’à l’existence du syndicalisme Retraités. »
Le désappointement vis-à-vis du politique est profond. Le syndicat apparaît alors un élément fédérateur pour dire son appartenance à certaines valeurs : « La préservation de l’environnement, l’attachement à la construction européenne et la mise en place des garanties sociales protectrices au niveau de l’Europe, la lutte contre les inégalités, la cohésion sociale… Nous avons aussi une responsabilité vis-à-vis des publics en grande difficulté. Cela donne aussi du sens au syndicalisme Retraités. »

Beau programme

Pédagogue mais toujours exigeant, Laurent Berger a voulu poser les bases de la vocation de l’UCR au sein de la confédération : « Il n’y a aucune raison que dans le monde du travail au sens très large, ceux qui deviennent retraités n’aient pas leur place dans une organisation syndicale. Les retraités doivent aider à la compréhension d’un monde qui vit de profondes mutations. Ils doivent porter des revendications spécifiques, explorer des chemins qui seraient insuffisamment investis. Ils sont les mieux placés pour faire vivre et transmettre l’ensemble des valeurs et des actions de la CFDT. »
Et le secrétaire général de la CFDT de poursuivre : « Vous avez une place spécifique, parce que vous êtes dans l’interprofessionnel. La reconnaissance des UTR comme syndicats est à la fois une avancée mais aussi un vrai défi. Mais le vrai défi pour toute la CFDT est de faire en sorte qu’on se développe à “l’entrée” de façon extrêmement forte pour ne pas nous retrouver dans la situation de la CGT avec 20 % des adhérents qui sont retraités… On progressera aussi quand on se dira que la syndicalisation au sein des UTR concerne des retraités qui s’interrogent sur la pertinence ou non d’adhérer à la CFDT retraités. Vous gagneriez à passer ce cap. Vous n’en êtes pas loin, mais il reste un petit effort à faire. »
La conclusion s’impose alors. Pour Dominique Fabre, secrétaire générale de la CFDT Retraités : « Notre réformisme doit nous conduire à anticiper l’évolution de la période de la retraite non plus comme un “retrait” de la société mais comme une période utile et nécessaire au sein de la société. »

Daniel Druesne

Edmond Maire et Laurent Berger : rencontre entre deux secrétaires généraux de la CFDT.
J-Pierre Druelle