Agirc-Arrco, les provocations du patronat
Pérenniser les régimes de retraites complémentaires Agirc et Arrco, c'est la mission assignée aux partenaires sociaux depuis le début de cette année. Après deux séances de négociations, tout est sur la table. Les propositions du Medef sollicitent fortement les salariés et les retraités. La CFDT propose la fusion des régimes.
Malgré les accords signés en 2011 et 2013 à la suite des crises financières, de nouvelles négociations se sont ouvertes cette année pour pérenniser les régimes de retraites complémentaires Agirc et Arrco. Gel des pensions, abattements sur les pensions pour un départ à la retraite avant 67 ans, baisse du nombre de points acquis pour les actifs, remises en cause sur les points acquis au titre du chômage et modifications des règles de réversion : dès la première séance de négociations, le Medef détaillait ses mesures. Elles sont restées sur la table depuis.
La mise en place des abattements temporaires figure comme une « clé de la solution ». Concrètement, le salarié qui partirait à la retraite à 62 ans tout en remplissant les conditions pour une retraite de base à taux plein, toucherait jusqu’à 67 ans une retraite complémentaire amputée. Au-delà des économies réalisées sur le versement de pensions, l’objectif est pour le patronat le recul de l’âge effectif de départ à la retraite.
Les chômeurs sanctionnés ?
Le Medef défend aussi une évolution des règles de la réversion. La réversion serait servie selon deux options : soit selon un taux minoré passant de 60 % actuellement à 50 %, voire même 33 %, soit au taux actuel mais en contrepartie d’une pension minorée pour l’assuré. Le Medef propose également de réduire les droits des chômeurs à hauteur de la contribution actuelle de l’Unedic et de l’État. Les retraités, quant à eux, subiraient un gel de leur pension pour trois années de 2016 à 2018. Le Medef est opposé à toute hausse des cotisations patronales qui alourdirait le coût du travail.
La CFDT juge ces propositions peu raisonnables. Pas question d’alourdir la facture pour les actifs et les nouveaux retraités. Le rééquilibrage des comptes exige des efforts, mais partagés par tous ; les entreprises doivent y prendre leur part. Les retraités modestes doivent être protégés. Et les salariés sans emploi ne doivent en aucune manière être sanctionnés. La CFDT demande aussi que soient prises en compte les carrières longues et la pénibilité. Elle souhaite de nouveaux chiffrages des mesures patronales (gels des pensions, réversion, abattements) et de l’impact de l’accord de 2013.
Butoir en juin ?
Surtout, la CFDT revendique la fusion de l’Agirc et l’Arrco en un seul et unique régime. L’histoire de ces régimes est marquée par ce rapprochement : création de l’Agirc, de l’Unirs, puis de l’Arrco, généralisation de la retraite complémentaire dans les années 70, création du régime unique Arrco en 1999. Et depuis près de quinze ans les deux régimes n’ont cessé de converger. Cadres et non-cadres cotisent quasiment aux mêmes conditions pour percevoir leurs futures pensions.
Au-delà des économies d’échelle (100 millions d’euros), cette fusion aboutirait à une mutualisation des réserves. Cela donnerait un souffle à l’Agirc, sans demander à ses affiliés des efforts considérables. Les salariés du privé ne seraient ni les victimes ni les payeurs. Au contraire, ils bénéficieraient quel que soit leur statut de nouvelles garanties au sein d’un régime renforcé.
La négociation devrait aboutir avant fin juin 2015 pour un accord entrant en vigueur au plus tard en 2017. Pour autant, les discussions devront reprendre, dans un court terme, si le projet de fusion était retenu. La CFDT souhaite une mise en œuvre à l’horizon 2020.
Ombretta Frache