Analyse de l’échec du sommet de Bruxelles
Le week-end des 14 et 15 décembre 2003 aura été marquant au plan européen et international : le fiasco du Conseil européen à Bruxelles et l'arrestation de Saddam Hussein. Si on parle encore du second événement et l'on passe sous silence le premier. Et pourtant c'est l'avenir de l'Europe, c'est notre avenir qui est en jeu.
Le non-résultat à l’issue du Conseil de Bruxelles atteste d’au moins un aspect. Il est une démonstration claire que le fonctionnement de notre Union à la règle de l’unanimité ne peut pas fonctionner et encore moins à 25, d’où la proposition de la Commission européenne dès 1996, lors de la préparation du Conseil européen d’Amsterdam, de quasi-généraliser le fonctionnement à la majorité qualifiée.
Depuis, cette proposition n’a toujours pas vu le jour ni à Nice et pas non plus à Bruxelles. Et pourtant c’est un des enjeux cruciaux pour permettre à notre Europe de fonctionner dans de bonnes conditions à 25, puis demain à 27, voire plus.
Agir vite et bien
Il est urgent de ne pas attendre car la situation est très préoccupante, en effet les conséquences de l’échec de Bruxelles sont un frein pour les perspectives européennes immédiates et à venir :
– nous allons fonctionner sur les bases du Traité de Nice qui est une véritable usine à gaz qui peut exploser à tout moment,
– la charte des droits fondamentaux n’est plus intégrée dans le Traité,
– la notion explicite de plein emploi n’existe plus,
– le rôle et la responsabilité des partenaires sociaux n’ont plus de référence,
– aucun calendrier, ni méthode ne sont fixées pour tenter de sortir au plus tôt de la crise,
– un télescopage va se produire entre projet de Constitution et perspectives financières 2007/2013 qui doivent être débattues dès les premiers mois de l’année 2004,
– les Etats-Unis ne peuvent que se satisfaire de cette situation qui résulte d’un affaiblissement de l’Union, et le reste du monde est inquiet,
– les eurosceptiques de tout poil de droite comme de gauche ne peuvent que se réjouir de ce rendez-vous manqué,
– une démobilisation encore plus grande des citoyens va se faire jour à l’approche des élections au Parlement européen prévu en juin 2004,
– 10 nouveaux membres de la famille européenne vont rejoindre la maison Europe sans que celle-ci soit en ordre de marche tant du point de vue politique qu’institutionnel.
La société civile doit se faire entendre
C’est le moment ou jamais où la société civile organisée doit se faire entendre et en particulier le mouvement syndical. Tout au long de l’élaboration du projet de Constitution, la société civile a, pour la première fois dans l’histoire de l’Union, été associée directement ou indirectement à son élaboration, celui-ci est trop sérieux et déterminant pour notre avenir pour le laisser aux seules mains des chefs d’Etats ou de Gouvernements.
Nous ne devons pas baisser les bras et rester offensifs et déterminés pour garantir le bien fondé du projet de Constitution et même exiger son amélioration. Il faut que la Présidence irlandaise établisse un calendrier et une méthode garantissant la transparence pour aboutir rapidement à la reprise des débats sur la base du projet de Constitution, Il faut que soit clairement identifié dans les différents chapitres du projet de Constitution : le concept du plein emploi, d’économie sociale de marché, que les partenaires sociaux puissent avoir accès à la cour de justice de l’Union, clarifier le fonctionnement à la majorité qualifiée pour les domaines de politiques fiscales et sociales.
Il faut enfin, redonner vie à un pacte de stabilité et de croissance tenant compte de nouvelles situations et réalités économiques qui soit accepté et respecté par tous.
C’est le sens de la campagne d’action que la Confédération européenne des syndicats va lancer dès le début de l’année prochaine sur le thème « L’Europe c’est nous ». La CES doit prendre la tête d’un grand mouvement de la société civile organisée pour se faire entendre des Chefs d’Etats ou de gouvernements qui siègent au Conseil européen pour qu’au plutôt ils se mettent d’accord sur une Constitution de l’Union capable de relever les défis internes et externes, capable d’agir et de fonctionner dans une Union élargie à 25 au 1er mai 2004 pour garantir la paix, la stabilité, la démocratie dans chacun de ses Etats membres et donc dans l’Union en générale.
Ce sont les seules conditions qui doivent nous permettre de ratifier un projet de Constitution européenne et répondre aux attentes des citoyens et citoyennes de l’Union.