Comment préparer au mieux la sortie de la crise ?
Scénarios incertains, ampleur des questions à traiter… Il reste beaucoup à faire pour sortir au mieux de la crise. Analyse.
Quel pilotage de la sortie de crise ? Les prévisions économiques ne font guère apparaître le retour prochain de la croissance. Rien dans les chiffres n’incline à un optimisme débordant pour 2010. Autre facteur, l’apurement des pertes dans les bilans bancaires n’est pas achevé.
Même si des efforts ont été faits, la volonté politique de coordination n’est pas suffisante. L’importance des déficits publics constitue un handicap.
Enfin, la capacité des institutions financières internationales (FMI, Conseil de stabilité financière, BRI) à mener à bien les réformes reste à démontrer.
Elles concernent de nouvelles modalités de régulation financières s’adressant à tous les acteurs de tous les pays. L’évaluation et l’ajustement des mécanismes prudentiels mis en œuvre doit être faite régulièrement sans attendre la prochaine crise.
Dans ces conditions, que faut-il faire ? « Oublier la crise » c’est le retour du chacun pour soi. C’est considérer que dans toute crise il est normal qu’il y ait des « gagnants » et des « perdants ». C’est aussi « laisser faire » la concentration financière et la finance de marché avec son cortège de « produits toxiques » et de bonus pour les traders.
« Faire autrement » c’est réhabiliter le long terme, c’est prendre en compte le développement durable, maîtriser les risques, développer une « finance patiente », concevoir la régulation non comme une contrainte qu’il convient de contourner mais comme une aide au développement.
Coupable et dangereux
Restent trois questions majeures.
– 1. Les questions monétaires et des taux de change des grandes monnaies (dollar, euro, yen et yuan) ont été occultées lors des trois derniers G20. Le désordre monétaire mondial fondé sur une entente sino-américaine se réalise au détriment du monde entier, Europe en tête. Ces questions monétaires ne doivent plus être les oubliées de la concertation internationale.
– 2. Le dernier sommet du G20 aborde de façon éclatée les questions de l’énergie. Il les prend sous l’angle de la transparence des marchés, de la stimulation des énergies renouvelables. Il manque une approche globale de ces questions alors qu’elles touchent au réchauffement climatique, au modèle de développement économique, aux reconversions et à la création de nouvelles activités économiques, aux migrations de population. Selon l’ONU, suite à des catastrophes liées au climat, d’ici 50 ans, 200 millions de personnes pourraient être concernées.
– 3. Le G20 n’aborde presque pas les questions dramatiques de la faim dans le monde. Après les émeutes de la faim qui ont secoué plus de 30 pays au printemps 2008, il n’est pas sûr que ses récentes décisions soient à la hauteur des enjeux. Comme le révèle le 10e rapport de la FAO sur « l’insécurité alimentaire », compte tenu de la crise, l’objectif du sommet mondial de l’alimentation est de réduire de moitié le nombre de personnes souffrant de sous-alimentation. Ce passage à « pas plus de 420 millions d’ici 2015 » ne sera pas réalisé si les tendances qui régnaient avant ces crises se poursuivent.
On le voit, beaucoup de choses restent à faire. Ne pas les entreprendre serait coupable. Contourner, esquiver les difficultés serait dangereux. Il faut donc être clair sur le diagnostic, la profondeur et les différentes facettes de la crise pour préparer du mieux possible « la sortie de crise ».
Jean-Pierre Moussy