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Élections en Allemagne : changement ou statu quo ?


Maintenant que les élections du 22 septembre en Allemagne sont passées, il convient de reprendre les dossiers européens qui sont demeurés en suspens : l'Union bancaire, l'actualisation des plans de soutien notamment à la Grèce, la mise en œuvre effective du plan pour l'emploi des jeunes, la politique énergétique notamment.

Pour trois raisons, les élections en Allemagne ne peuvent laisser indifférents les Européens.

Ce pays est d’abord le plus peuplé de l’UE : 82 millions d’habitants.

Ensuite son poids économique : le solde des finances publiques est pratiquement équilibré, le solde commercial en 2012 s’élève à 188 milliards tandis que le chômage se situe en dessous de 6%.

Troisième raison « idéologique » celle-là : la référence en Allemagne à « l’ordo-libéralisme », cette doctrine fondée sur un État de droit dans lequel la règle juridique sert de guide à la politique économique, et qui a déteint sur les doctrines européennes.

La paix retrouvée entre la France et l’Allemagne n’efface pas les différences entre les deux pays. Là encore trois sujets essentiels marquent des désaccords profonds.

D’abord la gestion des plans de soutien notamment ceux à la Grèce, la mise en place du mécanisme européen de stabilité (MES) et l’Union bancaire.

Ensuite la décision prise d’arrêter les centrales nucléaires d’ici 2022 mais le refus de réduire les émissions de dioxyde de carbone.

Enfin le refus de la chancelière de donner son accord à la fusion entre EADS et BAE (groupe britannique) qui aurait constitué une entreprise européenne de taille mondiale en matière d’aéronautique et de défense.

Négociations

Dans ce débat, le système des élections allemandes est à prendre en compte. Le système électoral réunit des éléments du scrutin proportionnel et des éléments du scrutin majoritaire : chaque électeur a deux voix : la 1re permet de désigner - au scrutin uninominal - le député de sa circonscription. La 2e détermine le nombre de voix revenant proportionnellement à chaque parti. Ce mode de scrutin aboutit souvent à constituer des coalitions.

Le 22 septembre, les électeurs ont renouvelé leur confiance à la chancelière Angela Merkel. Son parti, la CDU/CSU, recueille 41,5% des voix (311 sièges) ; le SPD : 25,7% (192 sièges) ; les Verts : 8,4% (63 sièges) ; « Die Linke » : 8,6% (64 sièges). La chancelière n’obtient pas la majorité absolue (le Parti libéral n’ayant pas réussi à se maintenir au Parlement) et doit donc ouvrir des négociations soit avec les Verts soit avec le Parti social-démocrate pour constituer une majorité.

Intervention de la Cour

Parler de l’Allemagne sans parler du rôle de la Cour de Karlsruhe est impossible. Ce tribunal constitutionnel juge la conformité des lois avec la loi fondamentale de 1949. Son influence dépasse le seul niveau national et se déporte de plus en plus sur le plan européen.

Ainsi la décision sur le traité de Lisbonne du 30 juin 2009 demande au gouvernement fédéral d’adjoindre à la ratification du traité une loi reprenant ses recommandations. La Cour de Karlsruhe considère que l’UE n’est pas un État fédéral démocratique mais une union d’États souverains.

De même la décision du 7 septembre 2011 sur l’aide à la Grèce. La Cour donne son accord tout en prévenant que celui-ci ne vaut pas pour d’autres aides : le « Bundestag ne pouvant transférer de façon inconditionnelle son pouvoir budgétaire à d’autres acteurs ».

Enfin, le 22 septembre 2012, la Cour autorise la ratification du traité sur le mécanisme européen de stabilité mais indique que la participation allemande doit être limitée aux 190 milliards prévus. Au-delà le représentant allemand au sein du MES ne pourra le faire qu’après un vote solennel du Bundestag.

Cette liste n’est pas close. C’est maintenant l’intervention « sans limite sur le marché secondaire de la dette souveraine à court terme des États par la BCE » qui est à son menu. Ces interventions de la Cour pèsent sur l’Union européenne et posent la question de la délégation de souveraineté consentie au plan européen.

Jean-Pierre Moussy

Au terme des élections, Angela Merkel n’obtient pas la majorité absolue. (photo Europa)