UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

Actu revendicative


Emploi et pauvreté : la pauvreté est devenue cannibale


« Comme toutes les richesses, le travail est de moins en moins partagé. » Et les responsables du Secours Catholique d’enfoncer le clou. « Ce ne sont pas les personnes qui sont en cause, mais bien souvent les choix et politiques de nos gouvernements et des agents économiques qui ont depuis trop longtemps placé le profit avant l’emploi. » À bon entendeur…

Curieux hasard ? En 1980, le Secours Catholique présentait son tout premier rapport statistique sous la forme d’un cri : « … et chômeurs ». Et le document qui présente les visages de la pauvreté de 2012 prend l’angle du chômage pour enfoncer le clou. Rien n’aurait-il donc changé ?

Il y a 30 ans en France, on expliquait l’exclusion comme relevant de deux phénomènes : un « fond » de pauvreté qui rassemblait tous ceux qui, de génération en génération, voyaient se reproduire sur eux-mêmes tous les mécanismes d’exclusion par manque d’accès à l’éducation, à la formation professionnelle, à la santé, au logement, à la culture… On parlait alors de « quart monde ». À ses côtés, avec les chocs pétroliers de la fin des années 70, était venu se surajouter un « flux » de pauvreté. D’autres personnes, à la suite du chômage, d’un divorce, d’un accident de la vie, basculaient alors dans l’exclusion. Et parfois s’en sortaient.

Aujourd’hui, on n’en est plus là. La situation s’enracine. La pauvreté est devenue « cannibale ». Elle finit par tout dévorer. La famille n’est plus protectrice. On compte 2 millions d’enfants pauvres en France. Et l’entraide a cédé la place à la concurrence entre les demandeurs d’emploi eux-mêmes, réduisant l’espace géographique, provoquant plus d’isolement social, et brisant toute identité sociale. La lutte des places a remplacé la lutte des classes !

68 % des personnes accueillies par l’association caritative sont sans emploi ! Et près de 47 % d’entre elles sont sans indemnités (+ 5 points en 5 ans !). Celles en emplois aidés sont passées de 12 % à 4 % (- 8 points ) en 10 ans. Et 30 % de celles qui ont un emploi l’exercent à temps partiel. Enfin, seules 2,4 % des personnes actives ont accès à la formation professionnelle !

Responsabilité sociale

Faut-il porter un coup de projecteur sur les disparités territoriales ? Le taux de chômage pour ces publics varie entre 51 % en Île-de-France et jusqu’à 80 % dans le Nord-Pas-de-Calais. Sans surprise, la Champagne-Ardenne, la Haute-Normandie, la Lorraine font aussi face à un taux de chômage particulièrement élevé.

N’est-il par urgent de sortir progressivement des replâtrages et autres ateliers d’insertion pour poser quelques exigences sur l’accompagnement vers l’emploi, sur les droits rechargeables, sur la surcotisation des contrats courts, sur l’accès aux complémentaires santé, comme l’a suggéré Chantal Richard, responsable du secteur « lutte contre l’exclusion » à la CFDT ?

On ne passe pas du silence à la parole, de la parole à la représentation, de la représentation à la participation d’un coup de baguette magique. « Oui, l’entreprise a une responsabilité sociale », finira par reconnaître Sophie Quentin, représentante du Medef. « On ne sort de la crise que par la créativité.

Il nous faut inventer une société dans laquelle toutes les formes de contribution au vivre ensemble soient reconnues et valorisées », affirme François Soulage en présentant les huit propositions de son association. Le président du Secours Catholique et ses équipes ont, eux, beaucoup de boulot !

Daniel Druesne

Les huit propositions du Secours Catholique

En interpellant les pouvoirs publics et les acteurs économiques, le Secours Catholique préconise :
 un véritable accompagnement personnalisé vers l’emploi (Pôle Emploi) ;
 mettre en œuvre une véritable responsabilité sociale des entreprises ;
 soutenir l’accès à l’emploi des jeunes (missions locales, formation en alternance…) ;
 sécuriser les structures d’insertion par l’activité économique
 faire évoluer les contrats aidés ;
 réformer le dispositif de soutien aux travailleurs pauvres (RSA activité et prime pour l’emploi) ;
 orienter les dispositifs de formation professionnelle en direction de ceux qui sont les plus exposés aux mutations économiques ou technologiques ;
 restaurer le droit au travail pour les demandeurs d’asile.