France Joubert, le combat d’une vie : les groupements d’employeurs
En réaction au dossier de Fil Bleu n° 281 « Les oubliés de la crise agricole », France Joubert regrette que le sujet des groupements d’employeurs n’ait pas été abordé. Cela nous donne l’occasion de parler de son engagement dans ce domaine, un des aspects de son parcours militant.
Issu d’une fratrie de six garçons, il entre très tôt dans la vie active en tant que surveillant, logé, nourri, dans une école technique de chauffeurs routiers. Il obtient, en alternance, le diplôme d’animateur de loisirs et participe à la création de la convention collective des animateurs de loisirs de l’enseignement privé. Il s’engage auprès des adultes handicapés mentaux avec l’objectif de les réadapter à la vie sociale et dans le travail.
Militant CFDT, il intègre l’Union départementale puis le poste de secrétaire régional de l’Union régionale interprofessionnelle CFDT de Poitou-Charentes, et, lors du congrès confédéral de 1992, est élu membre du bureau national confédéral, le temps d’une mandature.
À la retraite, France poursuit son engagement au sein d’organisations telles que Sauvons l’Europe ou France Active, mais surtout dans les groupements d’employeurs, structures essentielles pour les salariés car elles permettent, notamment dans les territoires ruraux, la gestion du temps partagé.
Groupements d’employeurs, leur genèse ?
Les groupements d’employeurs (GE) sont l’aboutissement d’une réflexion issue du monde agricole, qui, dans les années 1980, doit faire face à une véritable révolution : mécanisation, exode rural, etc. Les solidarités fonctionnent alors avec la mise en place progressive des Groupements agricoles d’exploitation en commun (Gaec), des Coopératives d’utilisation du matériel agricole (Cuma), des Groupements locaux d’employeurs dans l’agriculture (Glepa).
L’idée des GE, née d’un accord passé entre la FNSEA et la FGA-CFDT, est officialisée par la loi du 25 juillet 1985. Certaines régions sont plus réceptives : ainsi en Poitou-Charentes, dans le cadre de contrats de plan État/région, est créée, grâce à la ténacité de France, l’Association pour l’emploi rural, puis le Centre de ressources des groupements d’employeurs qui favorise des relations régulières entre groupements d’employeurs. Toutes les branches d’activités, autres que l’agriculture, sont aujourd’hui concernées.
L’essor des GE
France est convaincu de l’intérêt des GE pour l’image du syndicalisme. Ils ont mis en lumière un nouveau niveau de dialogue social – le dialogue social territorial – qui facilite l’organisation des solidarités sur les territoires.
Autre point positif, le GE est essentiel pour le salarié, saisonnier ou employé dans plusieurs entreprises, car il a un employeur unique : il le rémunère, gère son planning, facture aux entreprises les mises à disposition. Il assure le suivi et veille à l’évolution des salariés en fonction de leurs compétences et de leurs attentes. Le salarié, le plus souvent en contrat de travail à durée indéterminée, a accès à des droits proches de ceux de la grande entreprise.
Le GE peut aussi être un recours pour les seniors à qui il peut permettre de garder une activité tout en étant en retraite.
En 2008, au-delà des outils régionaux et nationaux, le Centre de ressources pour les groupements d’employeurs (CRGE) est mis en place à l’initiative de plusieurs projets européens. Leur reconnaissance est renforcée par l’inscription de leur développement parmi les propositions du Pacte du pouvoir de vivre qu’ont rejoint, aux côtés de la CFDT et de la Mutualité, de nombreuses associations, pour travailler ensemble sur les enjeux des transitions sociale, économique, démocratique. France Joubert, âgé aujourd’hui de 79 ans, est pour beaucoup dans cette reconnaissance.
Annie Kuhnmunch
Pour en savoir plus
France Joubert. Une vie de combat syndical à la CFDT et le dialogue social territorial pour exigence, Claude Aumon, Librairie des Territoires, 2016.