UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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Hélas, le sexisme ne recule pas !


Si les inégalités entre les femmes et les hommes sont largement reconnues en France, l’égalité est loin d’être gagnée et la société française demeure très sexiste. Victimes de harcèlements et de violences, désormais les femmes sortent de l’ombre et s’expriment.

« Le sexisme ne recule pas. Au contraire […] » Le cinquième rapport du Haut Conseil à l’égalité (HCE) présenté en janvier commence sur ce constat alarmant. S’il concède des avancées – plus de moyens financiers pour la police et la justice, des mesures favorables pour la contraception, les interruptions volontaires de grossesse (IVG) et la procréation médicalement assistée (PMA) –, « la société française demeure très sexiste », estime-t-il. Ce sexisme se traduit, dans les cas les plus graves, par une hausse des violences faites aux femmes et des féminicides (lire l’encadré).

Au travail, 23 % des femmes subissent un écart de salaire avec les hommes à compétences égales, 13 % ont vécu une discrimination à l’emploi. Concernant les violences sexuelles, physiques et psychologiques, 14 % déclarent avoir subi « un acte sexuel imposé » et 33 % ont eu des rapports sexuels suite à l’insistance de leur partenaire sans qu’elles en aient envie ; 22 % ont vécu une situation d’emprise psychologique et 15 % des coups.

Le sexisme incite les femmes à des renoncements. Ainsi 55 % des femmes interrogées renoncent à sortir et à faire des activités seules, 52 % à s’habiller comme elles le souhaitent et 41 % à parler trop fort ou à hausser le ton, et 8 sur 10 disent avoir peur de rentrer seules chez elles le soir.

Vieux clichés et jeune génération

Les clichés du sexisme ordinaire ont la peau dure y compris chez les femmes. Elles sont seulement 49 % à trouver « problématique » qu’une femme cuisine tous les jours, les hommes sont encore moins nombreux à s’en offusquer (37 %). 27 % des femmes et 40 % des hommes estiment « normal » qu’elles arrêtent de travailler pour les enfants. Inquiétant également : ces clichés font florès chez les jeunes. 23 % des jeunes gens estiment qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter. Enfin seuls 48 % des 15-34 ans jugent problématique l’image des femmes véhiculées dans les œuvres pornographiques contre 79 % des hommes de plus de 65 ans.

Les recommandations du HCE

Au vu de ces résultats, le HCE a publié dix recommandations au premier rang desquelles figure l’augmentation des moyens financiers et humains de la justice pour répondre aux violences familiales. Le Haut Conseil demande aussi qu’une obligation de résultat soit instaurée pour l’application de la loi sur l’éducation à la sexualité et à la vie affective. La régulation des contenus numériques, et notamment pornographiques, fait aussi partie des recommandations du HCE.

[Didier Blain

Les femmes âgées de plus de 60 ans victimes de violences conjugales

Le nombre de féminicides ne cesse de progresser depuis 3 ans. Il était de 102 en 2020, de 122 en 2021 et de 146 en 2022. Selon la Fédération nationale Solidarité Femmes qui gère la ligne 3919 dédiée aux appels des femmes victimes de violences conjugales, 9,8 % des femmes appelant ce numéro ont 60 ans et plus. Ces dernières sont également victimes de mort violente au sein de leur couple. Elles représentaient 31 % des morts violentes en 2018, 26 % en 2019 et 25,4 % en 2020. Ces statistiques du ministère de l’Intérieur précisent que « lorsque ces victimes sont âgées de 70 ans et plus, 76 % d’entre elles ont été tuées en raison de leur maladie, vieillesse et/ou de celle de l’auteur ».
Source : Les Petits frères des pauvres.

Sortir pour avoir sa place partout

« Sortir physiquement, déambuler hors de chez soi, dans la rue, pénétrer dans des lieux interdits (café, meeting), voyager. Sortir moralement des rôles assignés, se faire une opinion. » Michelle Perrot, historienne et féministe, a posé, dès les années 1970, la question du silence de l’Histoire à propos des femmes. Dans les cinq volumes de l’Histoire des femmes en Occident, qu’elle a codirigé avec Georges Duby, nous suivons l’histoire des conquêtes des femmes pour leur liberté, du Moyen Âge jusqu’à nos jours. Enfin, nous pouvons « comprendre les racines de leur domination et les rapports de sexes à travers l’espèce et le temps » et sortir de la distinction « le public, ce sont les hommes, le privé ce sont les femmes ».
Pas à pas, à travers les siècles, les femmes se sont battues pour conquérir la liberté dans l’égalité. De George Sand en passant par Simone de Beauvoir, du mouvement de 1968, « un enfant si je veux, quand je veux », pour arriver au mouvement #Me Too. On est passé de l’espace privé à l’espace public, parce que les femmes ont parlé et que, contrairement à autrefois, on les a écoutées. Le viol et les agressions sexuelles sont plus nombreux que ce qui est dit et il est désormais permis aux victimes de s’exprimer et d’être écoutées.
Danielle Rived

Égalité Femmes-Hommes, regarder le chemin parcouru et celui qui reste devant nous

C’est la règle en matière d’égalité. Ce combat comprend des moments de stagnation et parfois de régression. Cela est arrivé deux fois dans l’histoire de la CFDT. En 1944, quand dans l’euphorie de la victoire la confédération a supprimé les syndicats féminins pour créer des syndicats mixtes et en 1970 quand, dans la fièvre qui a suivi Mai 1968, notre organisation a supprimé la commission confédérale Femmes. Résultat : une baisse continue de femmes en responsabilité alors même que le nombre d’adhérentes allait croissant.

Au congrès de 1982, la CFDT, pionnière, inaugure une politique de quotas qui n’a fait que s’amplifier et fait d’elle, aujourd’hui, une des organisations les plus féminisées de France en termes de responsabilité.

En parallèle, nous nous sommes battues pour que les femmes occupent une place pleine et entière dans le monde du travail, pour la maîtrise de notre corps, contre toutes les formes de violence, pour la parité en politique et pour toutes les lois et les directives qui portent ce combat pour l’égalité.

La lecture de la dernière enquête du HCE sur le sexisme doit nous alerter. La société française reste très sexiste et les jeunes générations aussi. Le sexisme empoisonne les relations de travail et la vie au quotidien par des stéréotypes qui excluent ou qui marginalisent les femmes. Le combat n’est donc pas terminé et la vague #Me Too n’a pas tout emporté de l’ancien monde. Il faut que chacun, homme et femme, ait conscience de son rôle et se dépoussière la tête. Il faut que les hommes acceptent de porter une responsabilité collective contre le sexisme.

Enfin il faut appréhender le chemin qui reste à parcourir car l’égalité est à construire en permanence dans une société et une économie en mouvement. Les crises économiques affectent toujours plus les femmes, la montée des intégrismes aussi. Quant aux réseaux sociaux et autres jeux vidéo, ils véhiculent des images d’une société toujours plus violente où le corps des filles est de plus en plus sexualisé.
Il faut se rappeler et rappeler que les hommes et les femmes ont une histoire mêlée, que les acquis de femmes deviennent des avancées pour les hommes et qu’ils se libèrent en même temps qu’elles.
Annie Thomas
Secrétaire nationale de la CFDT de 1998 à 2009