UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

Notre activité


« Il importe de préserver tout ce qui fait société » 5/5


Jocelyne Cabanal, secrétaire nationale CFDT en charge de la protection sociale répond aux question de Fil Bleu.

Sommaire du dossier
  1. Les 80 ans de la Sécurité sociale 1/5
  2. La Sécu et son financement 2/5
  3. Les dispositifs de solidarité de la Sécurité sociale 3/5
  4. Des solidarités à géométrie très variable 4/5
  5. « Il importe de préserver tout ce qui fait société » 5/5

Fil Bleu : En quoi notre système de Sécurité sociale permet-il de faire société ?

Jocelyne Cabanal : Alors que nous célébrons les 80 ans de sa création, la Sécurité sociale subit de nombreuses attaques. En particulier, les cotisations et contributions sociales sont accusées, à tort, de pénaliser l’emploi. Ces critiques visent à justifier la fiscalisation du financement de la Sécurité sociale par la suppression des cotisations sociales, voire de la contribution sociale généralisée (CSG) ; recettes remplacées par l’augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Il se joue là quelque chose d’essentiel, dans un contexte politique menaçant à l’horizon de deux ans, pour l’exercice de leurs droits sociaux par les travailleurs et les retraités. Or c’est l’affiliation à des collectifs de différentes natures (caisses de Sécurité sociale, assurance chômage, mutuelle, groupe de protection sociale, syndicat, associations, etc.) qui développe le sentiment d’une appartenance à des collectifs, ce qui finalement fait société.

Entre la promesse républicaine, la réalité de l’action publique et le ressenti des travailleurs et des retraités, il y a des manquements qui provoquent une perte de confiance. La lutte contre l’extrême droite passe aussi par l’analyse de cette crise de confiance et l’élaboration de réponses permettant d’y remédier.

Comment faire évoluer la Sécurité sociale dans une approche universelle, en préservant une démarche de bien commun et de solidarité ?

Alors que notre société est fragilisée, il importe de préserver tout ce qui fait société et qui pourrait le faire davantage. La protection sociale doit continuer à couvrir les résidents contre l’ensemble des risques sociaux dans l’approche la plus universelle.
L’universalité renvoie à une conception de l’humanité, celle d’une égale dignité attachée à chaque personne. Elle permet de lutter contre l’assignation identitaire des personnes à ce qui serait l’un de leurs traits d’identité, laquelle est vite destructrice de toute fraternité, ce sentiment d’appartenance à un collectif large.

Entre impôt et contribution sociale, comment préserver l’autonomie de gestion de la Sécurité sociale et de coconstruction avec les partenaires sociaux ?

Fiscaliser le financement de la Sécurité sociale, ce serait réduire l’autonomie de gestion de la Sécurité sociale par rapport à l’État, avec le risque que l’État, dont le déficit et la dette sont plus importants que ceux de la Sécurité sociale, ne concurrence rapidement la Sécurité sociale dans l’affectation d’une ressource partagée.

La TVA est une taxe qui pèse davantage sur les ménages les plus modestes qui, sans capacité d’épargne, consomment la totalité de leur revenu. Elle n’est pas progressive et n’est même pas proportionnelle aux revenus des ménages. C’est une taxe très injuste.

Le remplacement des cotisations et contributions sociales par de la TVA serait une véritable « dévaluation sociale ». Comme les dévaluations monétaires des années 1970 et 1980, elle viserait à réduire les importations par une pression sur la consommation et à accroître la compétitivité-prix des exportations, mais à condition de geler les salaires.

La CFDT estime que des efforts seront nécessaires. Nous devons notamment renforcer l’efficience de nos systèmes de soin et du prendre soin, en luttant contre les rentes de situation de certains acteurs de la financiarisation. Pour être consentis, ces efforts devront être équitablement partagés, entre toutes et tous. Y compris les entreprises publiques ou privées, qui oublient souvent qu’elles bénéficient aussi de notre protection.

Propos recueillis par Danielle Rived