Les congés payés, je m’en souviens, c’était en mai-juin 1936, j’avais 4 ans. Chaque jour à la mi-journée j’accompagne ma mère qui porte le repas de mon père. Il occupe l’usine textile Agache qui compte environ 1 800 salariés. Bien que la majorité des salariés soient des femmes, seuls les hommes occupent l’usine. Est-ce une question de morale ou plus prosaïquement qu’il faut bien quelqu’un pour s’occuper des enfants...

Notre terrain de jeux

L’usine est immense. C’est un vrai quartier qui couvre plusieurs hectares avec ses rues parcourues de rails. Nous on joue : les plus grands nous mettent sur des wagonnets qu’ils poussent à travers les rues de cet interminable terrain de jeux.

Autre souvenir. Des grévistes à moto patrouillent à l’intérieur des murs d’enceinte pour surveiller les éventuelles intrusions, mais aussi pour guetter la venue des gardes mobiles à l’exemple de précédentes grèves.

Cette grève générale historique a permis l’obtention des délégués du personnel, la loi des 40 heures, les conventions collectives. Mais c’est l’institution des congés payés (15 jours) qui fut et reste la conquête emblématique de cette grève générale. C’est la seule qui a laissé des traces filmées.

À l’heure où tous les étés les congés sont la cause des immenses flux migratoires, combien de vacanciers savent qu’avant 1936 il n’y avait pas de droit aux vacances pour les salariés ? Et que ce droit a été conquis par l’action collective de ceux qui nous ont précédé.

Des congés aux vacances

Progressivement ces deux semaines sont passées à cinq semaines. Ils sont devenus une institution qui permet aux familles de se retrouver, de se ressourcer. Personne n’imagine qu’ils puissent être remis en question.

Reste à conquérir le droit aux vacances. Car congés payés n’est pas synonyme de possibilités de vacances pour les plus bas revenus, les familles nombreuses, les titulaires de minima sociaux et aussi de nombreux retraités aux faibles pensions. La CFDT participe à cette action.