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L’eau, un or bleu


Tout le monde n’a pas accès à l’eau potable sur la planète. La France fait partie des pays privilégiés, mais cela n’a pas toujours été le cas. Retour sur les différentes étapes de la distribution de l’eau dans notre pays.

Dans la capitale d’Afrique du Sud, Le Cap, en cette année 2018, on peut lire dans les toilettes publiques cet avertissement : « If it’s yellow, let it mellow ». Ces rimes recouvrent une réalité bien peu poétique puisqu’on peut les traduire par : « Si c’est jaune, je laisse, je ne tire pas la chasse d’eau. » Les quatre millions d’habitants de cette ville ont dû réduire drastiquement leur utilisation de l’eau sous peine d’être privés complètement de l’eau courante.

L’accès à l’eau en France, un privilège récent

En France, ouvrir un robinet et faire couler une eau saine, en quantité illimitée et à un prix, somme toute, accessible, est un luxe inouï, mais ce privilège est récent. Dans l’histoire de nos villes et de nos villages, l’accès à l’eau reste un problème central. Aux premiers siècles de notre ère, l’approvisionnement en eau est la manifestation de la puissance de Rome. Il n’est que d’évoquer le Pont du Gard, partie monumentale d’un aqueduc destiné à alimenter avec abondance les thermes, les jardins, les fontaines de Nîmes. Avec le déclin de Rome, ces réalisations tombent en désuétude.

Cependant au Moyen Âge subsistent des aménagements hydrauliques, derniers vestiges de la romanité, mais ils sont réservés aux palais ou à certaines abbayes. Pendant des centaines d’années, les habitants des villes et villages puisent l’eau dans les rivières, les sources ou creusent des puits.

La consommation d’eau est modeste. Ainsi en 1802, à la demande de Bonaparte, l’ingénieur Bruyère rédige une étude sur « les moyens pour fournir l’eau à Paris » et il évalue les besoins à sept litres par jour et par habitant !

Du puits au robinet

Au XIXe siècle, dans les villes, les puits sont souvent contaminés par les fosses d’aisance et des épidémies de choléra balaient régulièrement le pays, en 1832, 100.000 morts, 110.000 en 1854, mais aussi la typhoïde, la dysenterie font des ravages. On commence à soupçonner l’eau.

À Paris, sous l’impulsion du baron Haussmann, l’ingénieur Belgrand recherche des sources souterraines réputées pures et crée un réseau pour approvisionner la ville : dès 1880, la moitié des immeubles ont un robinet collectif dans la cour. L’eau ne desservira, que bien des années après, les logements.

La distribution de l’eau est confiée aux communes en 1790. Certaines communes la concède à des sociétés privées : en 1853, la Compagnie Générale des Eaux, en 1880, La Lyonnaise des Eaux, (plus tard, en 1933, sera créée la SAUR).

Alertées par la phrase de Pasteur : « Nous buvons 90 % de nos maladies », les autorités commencent aussi à se préoccuper de la qualité sanitaire de l’eau. Différents procédés seront testés, mais aujourd’hui, la potabilité est assurée dans 99% des cas par le chlore. L’eau courante restera en France un luxe pendant des décennies.

En 1933, un quart des communes seulement ont l’eau courante et, en 1945, 70 % des communes rurales en sont toujours dépourvues ! Il faut attendre 1980 pour que la quasi-totalité des Français aient l’eau courante à domicile.

Le stress hydrique

C’est le terme employé quand la demande en eau dépasse la quantité d’eau disponible, or un tiers de l’humanité ne bénéficie pas d’une eau suffisante et de qualité. Aujourd’hui, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) préconise par jour et par habitant vingt litres pour répondre aux besoins fondamentaux, cinquante litres pour vivre décemment et cent cinquante litres pour une consommation de confort.

Ce dernier chiffre représente la consommation actuelle en France. Il faut ajouter à cette consommation domestique l’usage le plus dispendieux : l’eau nécessaire à l’agriculture et à l’industrie. Ainsi, urbanisation, croissance démographique, pollution font de l’or bleu une richesse de plus en plus rare et convoitée.

Françoise Berniguet

L’or bleu, une richesse de plus en plus rare et convoitée.
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