Contrairement aux idées reçues, le taux d’emploi des jeunes est plus élevé si le taux d’emploi des seniors est important. Autrement dit, exclure les seniors de l’emploi n’améliore pas celui des jeunes !

Dans le contexte difficile du financement des retraites dû au vieillissement de la population, la France fait évoluer régulièrement ses règles sur l’âge de départ et la durée de cotisation. Elle cherche à améliorer le taux d’emploi de la population active. L’idée couramment répandue que le maintien en emploi des seniors (les 55-64 ans) empêcherait les plus jeunes (les 15-24 ans) d’accéder au marché du travail est fausse. Il n’y a pas de « substituabilité ».

La littérature économique synthétisée dans une étude de la chaire Transitions démographiques Transitions économiques (TDTE) de 2023 montre qu’un taux d’emploi élevé chez les seniors peut coexister avec un taux d’emploi consolidé chez les jeunes. Cette coexistence remet en question l’idée de substituabilité. C’est plutôt contre-intuitif.

Exemple de trois pays pour comparer le taux d’emploi suivant l’âge

Les économistes ont étudié les relations entre les deux générations sur le marché du travail des pays de l’OCDE (pays les plus riches). Il n’y a pas une masse fixe de travail : l’emploi des travailleurs plus âgés ne limite pas automatiquement celui des jeunes travailleurs et ne sont donc pas en concurrence directe. Ils peuvent en revanche évoluer en fonction des conditions économiques et sociales ou de l’évolution des compétences professionnelles qui ne sont pas identiques entre jeunes et seniors.

L’exemple pris dans trois pays permet d’effectuer des comparaisons :

• En Allemagne, on constate un taux élevé d’emploi des seniors à 73,3 % en 2022 et des jeunes à 50,4 % en 2022 ;
• En Suède, le taux d’emploi des seniors est très élevé à 77,3 % en 2022 et un taux d’emploi des jeunes relativement important à 44,5 % en 2022 ;
• En France, le taux d’emploi des seniors est de 56,9 % et celui des jeunes de 34,9% en 2022.

La comparaison montre que le marché du travail en France se distingue par un faible taux d’activité chez les jeunes et les seniors. Cette double faiblesse du marché du travail met la France au défi pour améliorer l’emploi et réduire le chômage dans ces deux groupes d’âge.

Ces études démontrent donc l’existence d’une corrélation positive entre le maintien dans l’emploi de davantage de seniors et l’accès des plus jeunes au marché du travail, peu importe le pays de référence ou la méthodologie utilisée.

L’emploi des jeunes et des seniors central pour la CFDT

La négociation conduite entre partenaires sociaux sur l’emploi des seniors vise à se rapprocher de cet objectif.
La CFDT demande :

• L’accès à la retraite progressive dès 60 ans (et non à partir de 62 ans comme le prévoit la réforme des retraites) ;
• Le renforcement des politiques de prévention ;
• Le renforcement du dialogue social en rendant obligatoire une négociation sur l’emploi et le travail des seniors (pénibilité, aménagement des temps de travail et son organisation, évolution professionnelle, changement de métier éventuellement, etc.).

En décembre 2024, les partenaires sociaux étaient ont signé un accord sur l’assurance chômage et l’emploi des seniors.

[Martial Crance, secrétaire national de la CFDT Retraités en charge des retraites