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La grippe espagnole, histoire d’une pandémie


Le 11 février 2020, l’Organisation mondiale de la santé donne un nom à une nouvelle maladie : le Covid-19 (acronyme de Coronavirus Disease 2019). Cette maladie évoque par sa gravité, son syndrome respiratoire aigu et son extrême contagiosité, la pandémie de grippe espagnole qui a sévi à travers le monde, il y a un siècle.

À partir du printemps 1918 se répand en quelques mois l’épidémie la plus meurtrière de l’histoire médicale pendant une période aussi courte. Les journaux français, pour ne pas démoraliser les combattants et corsetés par la censure, font silence sur cette maladie. Mais la presse espagnole titre sur l’épidémie, qui prend ainsi en France, et de manière fautive, le nom de « grippe espagnole ». Cette grippe, cette influenza, est d’origine incertaine. Peut-être est-elle apparue au Kansas, aux États-Unis, où des cas d’une grippe mortelle sévissent dans un camp de soldats en partance pour le front français. Ce serait donc des renforts militaires qui importent en Europe la maladie qui se répand de manière fulgurante sur des populations affaiblies par quatre années de guerre.

Un personnel médical désemparé

La grippe frappe la France en trois phases. Elle commence en avril 1918 par ce qu’on appelle la « grippe des tranchées » sans vraiment alerter les autorités, car entre les innombrables blessés du front et les ravages de la tuberculose, médecins et infirmières sont mobilisés sur d’autres priorités. Après une pause pendant l’été, la maladie flambe avec une virulence extrême de septembre à décembre 1918 et les soldats, démobilisés en novembre, contaminent leur famille. Des recommandations sont faites : hygiène, quarantaine, interdiction des rassemblements, en Amérique et en Angleterre port du masque. Un temps on pense que l’alcool sous forme de grog est efficace et Paris importe 50 000 litres de rhum vendus sur ordonnance en pharmacie ! Malgré cela, une troisième vague frappe le pays début 1919. Selon l’Institut Pasteur, en une seule année, cette grippe a fait 400 000 morts en France sur une population de 37 millions d’habitants ! Puis le virus s’éteint en métropole mais l’Europe possède des colonies. Paquebots et soldats démobilisés propagent la maladie dans le monde entier. Un tiers des 2 milliards d’habitants, que compte la planète à cette époque, est touché et le nombre total de morts serait, en estimation basse, d’environ 50 millions.

Conséquences

En France, cette pandémie grippale a de lourdes conséquences démographiques car la souche de ce virus est particulièrement létale pour les 20/40 ans, classe d’âge déjà décimée par le conflit, accentuant ainsi la saignée humaine de la guerre. Les conséquences sont aussi sanitaires et médicales. En 1922, au sein de la toute jeune Société des Nations est créé le Comité de la santé et de l’hygiène, ancêtre de l’Organisation mondiale de la santé. Des sciences embryonnaires comme la virologie et l’épidémiologie se développent. À partir de 1933, certains virus grippaux sont identifiés, mais il faut encore attendre de très nombreuses années pour l’élaboration du vaccin de la grippe saisonnière. Quant au virus de la grippe, dite espagnole, son génome n’a pu être séquencé qu’en 2005 en prélevant les tissus d’une femme inuit, conservée dans la terre gelée du permafrost.
Les chercheurs savent aujourd’hui que certains animaux sauvages sont des « réservoirs » de virus qui peuvent parfois se transmettre à l’homme, que les virus grippaux se recombinent, se transforment et peuvent échapper ainsi à notre système immunitaire. La prévention des pandémies devrait donc être mondiale et incluse dans le combat pour l’écologie en permettant l’harmonisation et la régulation des rapports de l’homme à son milieu.

Françoise Berniguet

En Angleterre, contre l’épidémie, on administre une potion aux enfants.
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