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Le morcellement de la planète par des murs


À une époque où hommes et femmes peuvent parcourir le monde en quelques heures, des États, des régions construisent des murs de béton, élèvent des grillages, déroulent des barbelés pour arrêter les flux humains. Ces barrières de plus en plus hautes, de plus en plus longues, de plus en plus étanches prolifèrent depuis quelques décennies.

De tout temps, les humains ont construit des murs pour se protéger, pour se ménager un espace de sécurité. Les plus importantes de ces constructions historiques ont une vocation militaire. Une des plus célèbres, la Grande Muraille de Chine, construite à partir du IIIe siècle avant J.-C., s’étend sur plus de 8 000 kilomètres pour protéger l’Empire du Milieu des invasions barbares.

L’Empire romain élève aussi à ses confins des barrières contre les peuples exogènes. La plus aboutie est le Mur d’Hadrien, construit au Ier siècle après J.-C., au nord de l’actuelle Angleterre, et qui serpente sur 700 kilomètres. Enfin, plus proche de nous, au XXe siècle, la ligne Maginot entre la France et l’Allemagne se présente comme une version modernisée de ces barrières anti-invasions à l’efficacité inégale !

Des murs pour empêcher de sortir ou pour séparer

Mais au-delà de la fonction sécuritaire, certains murs peuvent avoir une fonction idéologique dont la résultante essentielle est l’enfermement d’une population. L’hermétisme de la frontière nord-coréenne fait de la Corée du Nord une gigantesque prison interdisant depuis soixante ans la sortie de ses habitants. Le mur de Berlin, appelé « Mur antifasciste » par la RDA et « Mur de la honte » par les Occidentaux, a eu la même fonction de 1961 à 1989. L’appellation est évidemment différente selon que l’on se trouve du côté des « enfermeurs » ou du côté des enfermés !

Certains murs revendiquent même une fonction de pacification : les « Peace Walls » construits en Irlande du Nord, et en particulier à Belfast, à partir de 1962, visaient à limiter les violences entre catholiques et protestants et ils ne sont que très partiellement supprimés. Ou bien la « ligne verte » à Chypre, rigide zone tampon qui sépare la partie turque et la partie grecque. Mais dans tous les cas, ces murs, qu’ils soient à visée idéologique, politique ou sécuritaire, ont pour résultat de diviser, ségréguer, ostraciser.

Des murs pour empêcher d’entrer

Cependant, la situation la plus répandue est la construction d’une barrière entre un pays en développement, souvent à forte croissance démographique, et un pays riche. Les barrières anti-immigrations se multiplient sur tous les continents car les guerres, les différences de niveau de vie lancent les peuples dans de grandes vagues migratoires et les pays les plus favorisés sont rarement prêts à accepter ces mouvements de population. L’exemple le plus emblématique est, entre le Mexique et les USA, la frontière de 3 000 kilomètres que le président Trump veut étanchéifier par un mur.

Mais une prolifération de murs sur tous les continents atteste des divisions du monde : enclaves espagnoles au Maroc, mur en Cisjordanie, à la frontière indo-pakistanaise, entre Arabie Saoudite et Irak, en Afrique du Sud, en Hongrie, en Estonie… Le monde se referme et se barricade. Aujourd’hui, sur la planète, près de 70 murs, construits sur des dizaines de milliers de kilomètres, balafrent les continents. Ils témoignent, dans tous les pays, des peurs engendrées par l’altérité, par les mouvements migratoires et reflètent les angoisses liées à la mondialisation.

Françoise Berniguet

En dur ou en barbelés, mais dans tous les cas, diviser, ségréguer, ostraciser.
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