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Les responsables des naufrages dans la Manche


Les tragédies se succèdent au large de la Côte d’Opale, lors de la tentative de migrants de rejoindre l’Angleterre. Les passeurs sont pointés du doigt. Les politiques migratoires des deux côtés du Channel sont également en cause.

Début septembre, douze migrants, dix femmes et deux hommes, dont la moitié étaient mineures, ont perdu la vie, après un naufrage au large du cap Gris-Nez. Leur frêle embarcation de 7 mètres de long sur laquelle ils tentaient de traverser la Manche s’est disloquée avec 65 personnes à bord. Seules huit d’entre elles étaient pourvues d’un gilet de sauvetage.

« Il y avait du vent, il y avait beaucoup de vagues. Et c’était un petit bateau. Puis, il s’est passé quelque chose. En quatre ou cinq minutes, le bateau a été complètement détruit et a coulé. Tous les gens se battaient pour survivre et nous avons perdu beaucoup de monde », a raconté un naufragé érythréen à l’AFP. Il s’agit, à ce jour, du pire naufrage de l’année 2024, déjà très meurtrière avec 37 personnes noyées.

Un nombre record de traversées depuis le début de l’année 2024

Les traversées illégales de la Manche vers l’Angleterre, sur les six premiers mois, se chiffrent avec près de 22 000 arrivées de migrants. Dès son arrivée au pouvoir, en juillet, le Premier ministre travailliste britannique, Keir Starmer, a annoncé vouloir accélérer le traitement des dossiers de demandeurs d’asile, tout en durcissant la lutte contre les passeurs.

« Les discussions avec le nouveau gouvernement britannique doivent permettent d’harmoniser les politiques migratoires. Il faut démanteler ces réseaux criminels par la coopération », considère le maire de Boulogne-sur-Mer, Frédéric Cuvillier.

« La France et l’Angleterre doivent reconnaître la Manche comme une zone d’urgence humanitaire », déclare de son côté l’association Utopia 56 qui vient en aide aux personnes exilées et aux personnes à la rue.

L’unique responsabilité des passeurs ?

Pour Frédéric Cuvillier, «  ce drame s’explique par l’action de réseaux et de bandes de criminels dont le mode opératoire a évolué au fur et à mesure que les mesures de protection ont été mises en place, les interventions sont réalisées avec des petites embarcations qui permettent de déjouer toutes les surveillances puisqu’elles sont lancées à partir du littoral, indépendamment des conditions météorologiques ».

Les passeurs seraient-ils les seuls fautifs de ces tragédies à répétition ? Selon Ève-Marie Dubiez, adhérente de la CFDT Retraités et membre de l’association Aide migrants solidarité, « on peut toujours mettre ça sur le dos des passeurs criminels qui profitent de la misère et de la détresse des migrants. Mais cette situation est la conséquence de la politique migratoire du gouvernement. »

Et de dénoncer une militarisation de la côte autour de Calais, point de départ pour la traversée de la Manche, et l’échec de la lutte contre les réseaux de passage : « Cette politique répressive est dangereuse et inefficace. La plupart des migrants ont fui un pays où il y a la guerre, où ils sont victimes de répression. S’ajoutent des conditions de vie déplorables. Il y a parfois trois douches pour cinq cents personnes. Pour fuir tout cela, les migrants voient dans les passeurs un salut vers un eldorado, en tentant une traversée dangereuse, peu importe le prix que ça peut coûter. »

Le marché du travail en Angleterre, moins régulé qu’en France, et la langue anglaise attirent les migrants. Beaucoup viennent de pays issus du Commonwealth ou ont de la famille outre-Manche.

« On leur dit que la traversée est hyper dangereuse. Mais ça ne sert à rien. Ils voient les côtes en face, après tout ce qu’ils ont enduré… On n’est pas dupes. Ils ne s’arrêteront pas ici », déplore Olivier Ternisien, de l’association d’aide aux migrants Osmose 62.

[Jean-Pierre Druelle