Le rapporteur auprès de la commission des finances apporte quelques clés
Régis Juanico, député de la Loire, a accepté de nous recevoir pour évoquer les principaux progrès que cette loi recouvre.
Quels sont les éléments nouveaux apportés par cette loi ?
Elle permet d’abord une reconnaissance officielle des acteurs de l’économie sociale et solidaire, tout en leur donnant les moyens de se développer.
Parmi les nombreuses évolutions significatives pour le secteur, on peut retenir :
– la création de la coopérative d’activités et d’emploi (CAE) pour favoriser la création d’activité par les demandeurs d’emploi ;
– l’obligation d’informer préalablement les salariés avant toute cession d’une entreprise pour une éventuelle reprise sous forme ;
– la création de Scop d’amorçage : les salariés pourront être minoritaires 7 ans maximum dans le capital, le temps de réunir les fonds pour être majoritaires ;
– la possibilité ouverte aux mutuelles de s’associer entre elles pour proposer des contrats collectifs de coassurance dans le cadre de la généralisation de la couverture complémentaire santé ;
– la définition de la subvention publique donnera davantage de sécurité aux associations dans leurs relations avec les personnes publiques : une mesure très attendue par les 550 000 associations qui en bénéficient chaque année ;
– la reconnaissance du bénévolat et de l’engagement associatif par la création d’un volontariat associatif pour les plus de 25 ans, dans le cadre d’une mission d’intérêt général d’une durée de 6 à 24 mois et une meilleure reconnaissance de la valorisation des acquis de l’expérience pour les bénévoles.
L’ESS souffre d’être trop peu connue, par quels moyens attirer des investisseurs ?
La loi elle-même, ainsi que la large concertation qui l’a précédée, constituent des signaux forts pour les investisseurs, au-delà de ceux déjà spécialisés dans l’ESS.
Les outils de financement sont modernisés : agrément d’« entreprise solidaire d’utilité sociale », fonds propres, garanties, avances remboursables, « crowfunding » pour les TPE, prêts participatifs, mais aussi épargne solidaire (880 millions d’euros mobilisés chaque année).
Le secteur pourra aussi s’appuyer sur trois grands leviers d’investissement : 500 millions d’euros dédiés via la Banque publique d’investissement ; 100 millions d’euros dans le cadre du programme d’investissements d’avenir 2, sous la forme d’appels à projet, et 40 millions d’euros avec le Fonds d’innovation sociale abondé à parité entre l’État et les régions.
L’ESS doit-elle jouir de la complémentarité avec les entreprises classiques ou se présenter comme une alternative ?
On est au-delà de la simple complémentarité. Secteur clé de l’économie française, l’ESS représente 10 % du PIB et emploie 2,4 millions de salariés (un emploi privé sur huit). Des emplois bien souvent non délocalisables et ancrés dans la vie de nos territoires. Ces dix dernières années, les entreprises du secteur ont créé 440 000 nouveaux emplois, soit 23 % de hausse, contre 7 % en moyenne dans l’économie traditionnelle. Le secteur constitue aussi un gisement d’emplois pour l’avenir : jusqu’à 200 000 emplois supplémentaires attendus d’ici cinq ans, et 600 000 à renouveler d’ici à 2020, en raison des départs à la retraite.
De plus, ce modèle économique se caractérise par une plus grande tempérance, une moindre impatience quant à la rentabilité à court terme et une moindre perméabilité aux convulsions des marchés financiers, ce qui le rend plus solide sur la durée.
Propos recueillis par Georges Goubier
Régis Juanico
Outre le rapport sur la loi Economie sociale et solidaire pour lequel il s’est investi, il a notamment, à son actif : le rapport sur la simplification législative ; il est secrétaire de la Commission sur « l’exil des forces vives de la Nation » ; le projet de loi sur la simplification des entreprises ; il est rapporteur spécial du budget « sport, jeunesse et vie associative »… Il est aussi membre des groupes d’étude sur l’illettrisme, la pénibilité au travail, l’économie sociale et solidaire…