Mai 68 et la CFDT
Lorsque les conditions philosophiques, scientifiques, sociales, économiques d’un changement de société convergent, les propositions pour de nouveaux modèles de vie et les blocages contre tout changement foisonnent : tout devient politique. Les 10 années qui ont précédé Mai 68 ont bouleversé le paysage de la France.
Les revenus des Français augmentent et un tiers de la population a moins de 20 ans. Constructions de grands ensembles HLM. Cadences infernales dans les usines pour répondre à la croissance et refus du dialogue social. Un pays gouverné par des vieux avec des règles strictes et une morale patriarcale. Les jeunes affluent dans des universités désuètes avec une hiérarchie archaïque. Ils sont de plus en plus nombreux à entendre le bruit du monde – guerre du Vietnam, Printemps de Prague… – et à vouloir le changer. Et Mai 68 arriva, « Cours camarade, le vieux monde est derrière toi. »
Dossier coordonné par Danielle Rived, avec la collaboration de Annie Kuhnmunch, Jean-Pierre Moussy, Jean-Pierre Bobichon et Geo Goubier
Sommaire du dossier
– Mai 68 et la CFDT
– La grande grève de Mai 68
– Aux origines de Mai 68
– 1968 ou l’année de tous les possibles en France et en Europe
– Témoignage de Geo Goubier
– Cinq faits influencent Mai 68
– Le Constat de Grenelle
– « La CFDT a su faire le lien entre la lutte des étudiants et celle menée dans les entreprises »
– Témoignage sur des souvenirs de Mai 68
– Témoignage sur l’esprit de Mai 68
« ‘Ohé, ohé, Pompidou, Pompidou navigue sur nos sous’, chantait la CGT en matraquant les étudiants. La CFDT réclamait de meilleures conditions de travail, de vie et la présence syndicale dans l’entreprise. J’étais étudiant, ce jour-là je me suis promis de me syndiquer à la petite CFDT », nous confie Jean-Pierre Rieu De Pey, futur responsable CFDT de la branche Chimie« Nous étions tous les jours dans les manifestations, les communications étaient coupées. Les télécoms ne marchaient pas, la CGT bloquait les lignes. On descendait à la permanence du député qui nous prêtait son téléphone pour communiquer avec la confédération CFDT », raconte Claude Chéron, ouvrier dans la métallurgie et futur secrétaire de l’UD 31.
« On m’avait demandé de prendre la parole à l’université de Dijon (c’était la première fois que j’entrais dans une université). La situation des femmes téléphonistes avec leurs surveillantes était très serrée. Le passage aux toilettes était limité et contrôlé. Elles n’ont plus accepté qu’on les traite comme avant », affirme Michel Coffineau, secrétaire des PTT-CFDT.
« Le journal télévisé était décidé par le ministère de l’Intérieur. Lors de la conférence de rédaction, un représentant de l’Élysée était présent », confirme Chantal Weiss, CFDT-ORTF.
« Je finis mon service militaire, j’ai 21 ans. Le 29 mai 1968, branle-bas de combat, les chars sont armés, le paquetage est prêt, nous allons passer la nuit à attendre l’ordre de départ. Pour où ? Pour quoi ? ‘Oui vous irez à Paris protéger les monuments.’ Trois jours sur le qui-vive », se rappelle Raymond Labro