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Non à l’Europe cul-de-sac pour les réfugiés


L’accord conclu le 18 mars entre la Turquie et l’Union européenne pour tenter de résoudre la crise migratoire est très controversé.

Débordée par l’arrivée d’un million de personnes fuyant pour la plupart la Syrie, l’Irak et l’Afghanistan, l’Union européenne, en contradiction avec ses valeurs de solidarité, générosité et respect des droits de la personne humaine, s’est divisée profondément sur les réponses concrètes à apporter pour tenter de remédier à cette situation innommable.

Le devoir des dirigeants politiques, associatifs, syndicaux est d’expliquer, de faire barrage aux attitudes xénophobes, d’agir et de ne pas se laisser aller au gré des opinions publiques, mais d’avoir le courage d’assumer leurs responsabilités. Angela Merkel a eu ce courage. Elle l’a payé cher politiquement lors des résultats électoraux dans trois Länder, mais elle persiste.

Une solidarité au compte-gouttes

À l’issue de deux jours de discussion, l’Union européenne et la Turquie sont parvenues à un accord le 18 mars. « Ce n’est pas un très bon accord, mais on n’a pas d’autres alternatives. » Ce résumé, d’un diplomate européen, exprime le sentiment controversé de la situation. La frontière entre la Grèce et la Turquie est là, bien réelle. Encore faut-il ne pas faire n’importe quoi !

Le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) – qui avait mis en garde « contre les risques de possibles d’expulsions collectives et arbitraires » –, estime que « la manière dont l’accord va être mis en œuvre sera cruciale ». De son côté, la Commission européenne a assuré que le mécanisme respectait le droit international. « C’est un travail d’Hercule qui nous attend, particulièrement en Grèce », a reconnu Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne. Pour 2,7 millions de réfugiés que la Turquie accueille, l’Union européenne s’engage à en réinstaller 72 000 dans le cadre d’engagements pris par les 28 États membres. Une solidarité au compte-gouttes, celle, hélas, des petits pas. Sur le plan financier, une aide de 3 milliards d’euros sera attribuée à la Turquie en attendant, et sous conditions, une nouvelle enveloppe d’ici à fin 2018.

Face aux critiques parfois justifiées, il fallait un signal fort pour tenter de faire barrage aux passeurs, aux mafiosi de tout poil et réunir les conditions pour mettre fin au trafic en mer Égée. Plus de 460 migrants sont morts noyés depuis le début de cette année et 143 000 réfugiés sont arrivés en Grèce via la Turquie. La Grèce a dû gérer le passage d’un million de migrants en 2015.

Yvan Ricordeau, secrétaire national de la CFDT en charge des dossiers européens et internationaux, considère « qu’utiliser les réfugiés comme monnaie d’échange est indigne d’une politique européenne. Elle est même en contradiction avec les valeurs européennes de solidarité et celles du syndicalisme ».

Ce n’est pas de barbelés mais de ponts dont l’Europe a besoin.
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Oui à l’Europe des ponts

De son côté, la Confédération européenne des syndicats (CES) critique fermement le traitement et l’accueil des réfugiés : « L’Europe ferme ses portes. Les dirigeants européens ont décidé que les victimes de guerre doivent aller vivre ailleurs. Ils octroient de l’argent à la Turquie et à d’autres afin de garder les réfugiés en dehors de l’UE, sans même insister pour qu’ils aient accès à des conditions de survie humaines et décentes. »

Ce n’est pas de forteresses, de barbelés ou de murs dont l’Europe a besoin, mais de ponts pour que l’Europe retrouve ses fondamentaux de paix et de solidarité, ce que des États membres de l’UE n’auraient jamais dû oublier.

Jean-Pierre Bobichon

Missions d’information du CESE sur la situation des réfugiés : le point de vue des organisations de la société civile

Dans le cadre de sa réflexion sur la stratégie de l’UE en matière de migration, des délégations du CESE (Comité économique et social européen) se sont rendues dans 11 États membres (Autriche, Suède, Grèce, Hongrie, Allemagne, Croatie, Slovénie, Italie, Malte, Pologne et Bulgarie) afin de cerner les problèmes et les besoins et d’échanger avec les différents acteurs de terrain, issus principalement de la société civile. Ces missions ont donné lieu à un rapport qui vient d’être publié. Il contient plusieurs propositions d’action en direction des institutions de l’Union européenne pour faire face à la crise migratoire.
www.eesc.europa.eu