Paroles d’une réfugiée ukrainienne
Valeria Ivashchenko, 24 ans, a fui son pays. Dotée de la protection temporaire, elle a témoigné à l’assemblée générale de la CFDT Retraités de Champigny/Villiers-sur-Marne/Le Plessis-Trévise.
« Je suis ukrainienne. Je travaillais comme conseiller juridique à Sievierodonetsk, mais l’agression de la Russie m’a privée de mon emploi, a détruit ma maison et m’a obligée à quitter mon pays pour pouvoir vivre dans un endroit où il n’y a pas d’explosions d’obus à chaque minute, où les infrastructures ne sont pas bombardées et où les biens des civils ne sont pas détruits.
Une guerre larvée depuis huit ans
Avant la guerre, l’Ukraine était le pays d’Europe le plus étendu et l’un des plus importants fournisseurs de produits agro-industriels en Europe et dans le monde. Le pays était exportateur de produits métalliques, chimiques et de bois. Il disposait de soins de santé, d’un système éducatif, d’un réseau bancaire et d’une administration performants.
Depuis 2014, la Russie tente de détruire notre État souverain et démocratique. Elle a annexé la Crimée et occupé une partie des régions de Donetsk et Louhansk. De 2014 au 23 février 2022, la Russie s’est battue secrètement avec l’Ukraine, sous le couvert de défenseurs de la République du Donbass. Le 24 février, elle a ouvertement attaqué l’Ukraine, sans raison. À ce jour, environ 20 % de notre territoire est sous le contrôle des occupants. Environ 12 millions d’Ukrainiens sont devenus des personnes déplacées à l’intérieur du pays. Plus de 5 millions sont partis à l’étranger.
L’invasion et ses exactions
La Russie a organisé un véritable génocide du peuple ukrainien. Les soldats tuent, violent et torturent des enfants, des femmes, des personnes âgées, des personnes non armées. Le monde ne devrait pas garder le silence sur les tragédies de Marioupol, Kherson, Sievierodonetsk et de nombreuses autres villes. Les mots ne peuvent dire quelles horreurs l’armée russe a commises et commet encore. Des centaines de personnes meurent chaque jour sous les bombardements ennemis parce qu’elles sont ukrainiennes.
Les déclarations de certains politiciens sur la nécessité de renoncer à nos territoires sont inacceptables. Les négociations ne sont possibles qu’avec des démocraties. L’Ukraine défend l’Europe et le monde entier contre l’agression russe. Nous avons besoin d’armes pour protéger nos territoires, aider à restaurer les infrastructures et les logements. Nos sacrifices sont pour le monde entier.
Quitter son pays pour survivre
Le 24 février 2022, je me suis réveillée au son des bombardements. J’étais à Kiev, où j’ai passé les douze premiers jours de la guerre. Chaque jour, les troupes russes tiraient, bombardaient, essayaient de prendre Kiev, sans succès grâce à nos braves soldats. J’ai décidé d’aller dans un endroit plus calme de l’ouest de l’Ukraine. Mais aucune ville ne peut être qualifiée de sûre ! J’ai décidé d’aller en France, pour attendre au calme la fin de cette folle guerre.
À mon arrivée, j’ai dû attendre deux semaines pour obtenir le statut de protection temporaire en raison d’obstacles bureaucratiques et deux mois pour recevoir une aide financière. Heureusement je suis entourée de personnes bienveillantes qui me soutiennent. Les réfugiés, arrivant en France sans un euro en poche et sans connaissance de la langue, ont du mal à survivre. Depuis deux mois, je suis en recherche d’emploi. Diplômée, avocate avec expérience, maîtrisant plusieurs langues dont le français, je ne trouve pas d’emploi. Je souhaiterais créer un programme pour aider les réfugiés à s’intégrer dans la société et l’économie de l’État.
Merci aux Français pour leur hospitalité, leur aide, mais la guerre n’est pas finie et l’Ukraine et les Ukrainiens ont encore besoin d’aide.
Propos recueillis par Jean-Pierre Bobichon