UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

Actu revendicative


Pour comprendre le remboursement des médicaments


Le gouvernement veut diminuer ou cesser le remboursement de certains médicaments. C'est donc le moment de rappeler dans quelles conditions la prise en charge d'actes médicaux ou de médicaments est faite. Pour être remboursé, tout médicament doit être efficace, sûr, utile et efficient. C'est un organisme indépendant, la Haute autorité de santé (HAS), qui évalue les médicaments. Pour la CFDT, ou un médicament est sûr, efficace et utile et alors il est remboursé normalement ou il ne remplit pas ces conditions et le déremboursement total est envisageable.

1. Quelle est la signification sociale d’un remboursement ?

L’assurance maladie repose sur un principe simple : chacun contribue en fonction de ses ressources et ses soins sont pris en charge en fonction de ses besoins. Cette règle est la base d’une grande solidarité entre ceux qui ont le plus de ressources et ceux qui en ont peu, entre les bien portants et les malades, entre les familles nombreuses et les personnes seules. Cette caractéristique a été largement soulignée lors des travaux du Haut comité pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) en 2004.

Cela veut dire que tout soin, tout acte médical, toute dépense de santé passe du domaine individuel au domaine collectif. Les soins répondent aux conditions de santé propres à chacun de nous mais la prise en charge financière passe dans le domaine collectif. Ainsi l’usage des soins fait par chacun est supporté par tous. C’est particulièrement vrai pour les régimes de base où s’établit une solidarité très large. C’est vrai aussi pour les contrats de couverture complémentaire santé.

Il en découle la nécessité d’établir des règles qui définissent à la fois ce qui est bon pour la santé de chacun et ce qui est pris en charge collectivement. Ainsi tout remboursement de soin, d’acte médical ou de médicament prend une dimension sociale collective.

2. Quels sont les critères d’admission au remboursement ?

Pour pouvoir bénéficier d’une prise en charge par l’assurance maladie, tout acte médical ou tout médicament doit répondre à quatre critères : être efficace, sûr, utile et efficient.

L’efficacité. L’acte ou le produit (médicament) doit produire des effets thérapeutiques mesurables à partir d’indicateurs physiologiques ou cliniques. Certains anciens médicaments mis en place avant la création de la commission d’autorisation de mise sur le marché (commission AMM) n’ont pas été évalués selon les méthodologies actuelles.

La sûreté. L’acte ou le produit remboursé ne doit pas être dangereux dans ses conditions normales d’utilisation. Cette condition est vérifiée lors de l’inscription sur la liste ouvrant droit au remboursement mais elle doit être vérifiée tout au long de l’usage du médicament qui se fait dans des contextes variés, sur des malades différents ou en même temps que d’autres médicaments. Les effets nocifs se révèlent parfois avec un retard considérable ou même sur la génération suivante. Ainsi cette notion de sûreté doit être contrôlée tout au long de l’usage du médicament. Si elle n’est plus vérifiée, cela peut conduire au retrait du médicament ou à des limitations de son usage. C’est le problème des accidents iatrogènes, c’est-à-dire des effets indésirables ou nocifs consécutifs à l’utilisation des médicaments. L’importance de cette question en a fait une priorité de santé publique.

L’utilité. L’acte ou le produit doit apporter un « plus » par rapport à ceux qui existent déjà. Il doit conduire à plus de chances de guérison. Cette qualité doit s’apprécier de façon individuelle mais surtout collective. C’est la notion de service médical rendu. Ainsi un médicament « inutile collectivement » est un médicament dont on peut se passer, ce qui ne veut pas dire qu’il est inefficace. En effet, le service médical rendu (SMR) s’apprécie en tenant compte à la fois de son efficacité, des éventuels effets indésirables, de la gravité de la maladie, de son intérêt préventif et de sa place par rapport à la politique de santé publique.

L’efficience. Cette notion se rapproche de ce que l’on appelle couramment le rapport qualité-prix. En effet, les limitations financières des régimes d’assurance maladie ne permettent pas de prendre en charge tout ce qui est utile. Il est nécessaire de faire des arbitrages en faveur de priorités. Cette notion est difficile à utiliser car elle suppose que l’on connaisse toutes les économies que peut entraîner l’usage d’un médicament cher et nouveau. Elle est déjà partiellement abordée lorsqu’est prise en considération l’utilité d’un médicament ou d’un traitement, c’est-à-dire ce qu’il apporte en plus par rapport à ceux existants.

3. Quel est le processus d’admission au remboursement ?

Le processus d’évaluation des médicaments a été longuement expliqué dans le numéro 178 du Bulletin du Retraité de février 2004. Ce processus vaut également pour les actes médicaux et pour les dispositifs médicaux. Depuis la réforme de l’assurance maladie en août 2004, la Haute autorité de santé (HAS) est responsable de toutes les questions relatives à l’évaluation des produits de santé, des dispositifs médicaux et des actes médicaux.

Le processus regroupe à la fois des critères médicaux objectifs et des notions qui font intervenir les aspects sociaux. C’est donc là que se rencontrent à la fois le rôle d’organismes indépendants d’expertise et le rôle des partenaires sociaux. Les représentants des usagers et des salariés dans les conseils de l’assurance maladie sont à même de prendre en compte ces derniers aspects d’autant plus qu’ils sont impliqués dans la gestion financière des régimes et qu’ils doivent contribuer à en garantir la pérennité.

4. Pourquoi un organisme indépendant pour évaluer les médicaments ?

Les différentes crises sanitaires dont la France a été le théâtre ces dernières années (sang contaminé, vache folle, canicule de 2003 et maintenant risque lié à la grippe aviaire) tout comme le besoin permanent d’expertise et d’évaluation justifient l’existence d’organismes permanents dont l’indépendance et la compétence sont les garants d’analyses objectives. À ce jour, ce rôle dans le domaine des soins et des médicaments est rempli par la Haute autorité de santé (HAS) et les différents services qui la composent.

Les réactions des professionnels du médicament après l’avis qu’elle vient de donner sur plus de 200 médicaments montre qu’elle a su travailler en dehors des pressions des industriels. Cette indépendance doit être défendue car c’est l’intérêt des usagers qui en dépend. Il reste ensuite à espérer que les pouvoirs publics sauront respecter le travail de ces organismes d’évaluation indépendants.

5. Quel sens donner aux « déremboursements » actuels ?

Que l’on parle de déremboursement d’un médicament (cessation totale de prise en charge par l’assurance maladie) ou de déclassement (baisse du taux de remboursement, par exemple de 65% à 35%), les réactions sont toujours violentes. Cela se comprend. Tout ce qui touche la santé concerne profondément chacun d’entre nous et entraîne à l’évidence des réactions partiellement subjectives basées sur des appréciations très personnelles.

Si le déclassement (baisse du taux de remboursement) est justifié par le niveau de service rendu des médicaments, on constate malheureusement que le gouvernement recherche d’abord de moindres dépenses pour l’assurance maladie. C’est un transfert de charge des régimes de bases vers les couvertures complémentaires, transfert vécu comme une tendance à la privatisation de l’assurance maladie.

La multiplication possible des taux de remboursement des médicaments (100%, 65%, 35% et peut-être 15% et 0%) crée les conditions pour aller progressivement vers une diminution de la prise en charge et la CFDT ne l’admet pas. De plus, la récente convention médicale a déjà été critiquée pour la multiplication des tarifs d’honoraires des médecins qui la rend incompréhensible pour les malades. Il serait donc inadmissible que la multiplication des taux de remboursement conduise à la même situation pour les médicaments.

Pour la CFDT, rien ne justifie la baisse du taux de remboursement

La CFDT n’accepte pas que le taux de remboursement de certains médicaments soit diminué. De telles pratiques inspirées par des considérations financières ne sont pas admissibles. Seuls des critères d’efficacité, de sûreté ou des choix de traitements peuvent conduire à des déremboursements totaux. Ou un médicament est sûr, efficace et utile et alors il est pris en charge normalement ou il ne remplit pas ces conditions et le déremboursement total est envisageable. Encore faut-il que ces décisions soient alors clairement expliquées dans un langage compréhensible non seulement des professionnels mais surtout des usagers et qu’elles indiquent dans un contexte de transparence les raisons qui ont conduit à ces décisions et les alternatives de traitement possibles.