UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

Actu revendicative


Pour la dépendance, il faut une réponse collective, solidaire et publique


Les organisations syndicales de retraités CFDT, CFE-CGC, CGT, CFTC, Unsa et la FGR-FP appellent tous les retraités à participer aux manifestations qu'elles organiseront le 25 novembre prochain.

Depuis des années, les gouvernements successifs projettent de créer une véritable couverture sociale afin de prendre en charge les personnes en perte d’autonomie.

Le président Sarkozy a confirmé à plusieurs reprises ce projet, mais nous constatons que la réalisation en a été différée chaque fois. Récemment il a annoncé que ce dossier serait ouvert après que celui sur les retraites soit terminé. C’est dans cette optique que les organisations syndicales de retraités CFDT, CGT, CGC, Unsa et FGR-FP signataires de ce document ont voulu affirmer leurs revendications et exprimer leurs craintes et leur opposition à certaines pistes évoquées récemment.

Un enjeu de société qui demande une réponse de la collectivité nationale

Les enjeux sont importants. Les projections démographiques montrent que la population des plus de 80 ans passera dans notre pays à quatre millions de personnes d’ici l’année 2020, soit une augmentation de 80%. Même si l’espérance de vie en bonne santé progresse plus vite que l’espérance de vie elle-même, cette forte augmentation des plus de 80 ans entraînera une augmentation importante des personnes âgées en perte d’autonomie.

La perte d’autonomie est un des drames de la vieillesse. Les causes sont diverses mais proviennent très souvent de maladies neurodégénératives (Alzheimer, Parkinson...). Elles sont aussi liées aux conditions de travail et à l’insuffisance de la politique de prévention.

Il s’agit donc d’une question de société à laquelle la collectivité nationale doit apporter une réponse satisfaisante aux besoins exprimés. Le gouvernement actuel ne doit pas éluder cette question. Il lui incombe d’être à l’origine d’un projet ambitieux qui soit à la hauteur des enjeux.

Une prise en charge sans barrière d’âge

Les organisations syndicales de retraités confirment la position qu’elles ont prises en 2004 en apportant leur accord et leur soutien à un rapport du Conseil économique et social demandant « une prise en charge collective, quel que soit leur âge, des personnes en situation de handicap ».

La loi du 11 février 2005 a ensuite apporté des éléments de réponse allant dans ce sens. Un calendrier avait fixé une échéance de cinq ans pour aboutir à une harmonisation des prises en charge. Ce calendrier est malheureusement dépassé. Mais cela ne doit pas faire oublier que l’objectif doit rester d’actualité.

Aboutir à une prise en charge des personnes en situation de handicap ne veut pas dire uniformité des réponses qui doivent être personnalisées. Par contre cela doit conduire à une continuité des dispositifs à adapter aux situations spécifiques rencontrées tout au long de la vie.

Développer la prévention

Pour l’être humain, garder toutes ses capacités d’autonomie jusqu’à la fin de sa vie est légitime. La prévention est un moyen pour lutter contre la perte d’autonomie. Elle doit être menée tout au long de la vie. Ce doit être une des dimensions de la politique nationale de santé publique intégrant l’éducation à la santé, la médecine scolaire et la médecine du travail. Les systèmes de santé doivent y contribuer par des actions spécifiques.

En outre, une politique particulière de prévention doit être menée en direction des personnes âgées. Elle peut revêtir plusieurs formes, parmi lesquelles :
 visites médicales de dépistage ;
 prévention des chutes ;
 animations d’ateliers « mémoire » ;
 actions de prévention portant sur l’audition et la vision ;
 prise en charge spécifique en cas d’hospitalisation.
Cette liste n’est pas exhaustive.

Les moyens actuels de prévention ne sont pas à la hauteur des besoins. Les financements publics ont négligé ce domaine pour se limiter aux prises en charge lorsque la dépendance commence déjà à s’installer.

Répondre aux besoins des personnes restées à leur domicile

Les derniers sondages montrent que les personnes âgées souhaitent rester dans leur domicile le plus longtemps possible. Le maintien à domicile doit donc être privilégié. Il permet le maintien de la vie sociale. Pour ce faire, il faut développer et améliorer très sérieusement les services et les soins à domicile, ainsi que leur organisation, leur coordination et leur prise en charge financière.

On constate aujourd’hui un trop grand nombre d’intervenants et un manque de cohérence dans leurs actions. Se posent également les problèmes de la formation de ces intervenants (majoritairement féminins) qui doit être renforcée, de leurs conditions de travail et de leurs rémunérations.

Une politique d’adaptation des logements aux besoins des personnes âgées est attendue également.

Pour une politique coordonnée et de qualité dans les aides à la personne

Depuis 2005, on constate une situation déplorable où tous les services à domicile ont tendance à être considérés de la même façon. Il n’est pas possible que des aides qui apportent un confort de vie soient traitées de la même façon que des aides qui sont indispensables pour permettre à une personne âgée d’avoir une existence décente. La fiscalité de ces services doit être revue, spécialement lorsqu’ils s’adressent à des retraités ayant de faibles revenus.

En 2009, ces services (en particulier les associations) ont connu des difficultés financières telles que certaines ont cessé leur activité. Les causes de ces situations sont variées mais il est indiscutable que la façon dont leurs tarifs sont imposés ne favorise pas celles qui font de réels efforts pour améliorer la qualification des intervenants et la qualité des services offerts.

Améliorer la tarification de ces services sans en reporter la charge supplémentaire sur les personnes âgées s’impose.

Une offre insuffisante d’accueil en établissement

L’entrée en établissement est perçue très souvent comme une solution de dernier recours. Elle est rarement choisie. Elle est mal vécue par de nombreuses personnes âgées. Toutefois, elle est souvent une bonne solution qui permet à la personne de se sentir moins isolée, d’être prise en charge globalement et d’être déchargée des contraintes du domicile. La transition de la vie à domicile à la vie en maison de retraite doit être améliorée. Ces établissements doivent être de taille humaine et viser la proximité avec les anciens lieux de vie des personnes hébergées. La qualité de l’accueil joue un rôle essentiel.

Le nombre de places en Ehpad (appelés couramment maisons de retraite médicalisées) est très insuffisant. Le rythme actuel des créations de places en Ehpad (7 500 places par an) ne répond pas aux besoins actuels et futurs.

Le taux d’encadrement, c’est-à-dire le ratio entre le personnel d’encadrement et les personnes accueillies est trop faible. Il s’élève à l’échelle nationale à 0,57 équivalent temps plein. C’est nettement insuffisant pour faire face à l’accueil de personnes de plus en plus dépendantes.

Des tarifs d’hébergement trop élevés

Les prix de journée en établissement sont très élevés et très variables. Ils sont nettement plus élevés en Île-de-France qu’en province, dans le secteur privé commercial que dans le secteur public ou privé associatif. A ces tarifs d’hébergement, très élevés, s’ajoutent les frais liés à la perte d’autonomie qui ne sont pris en charge que partiellement par l’APA (Allocation personnalisée d’autonomie). Ces grandes disparités de tarifs doivent être réduites ; les tarifs doivent être mieux encadrés par les pouvoirs publics ; le reste à charge est beaucoup trop élevé pour les personnes concernées ou leur famille.

Différentes études récentes (Cour des comptes, mission sénatoriale, Fédération hospitalière de France, Drees, Igas et cabinet KPMG) apportent des estimations sur le prix journalier. Le montant mensuel de 1 500 euros est donné comme un minimum. Les tarifs peuvent dépasser 2 000 euros par mois et même 3 000 dans certains établissements. Cette situation est difficile à admettre alors que le montant moyen des pensions de retraite n’est que de 1 200 euros environ. Cette disparité est particulièrement forte pour les femmes qui ont en moyenne des pensions inférieures de 38% à celles des hommes.

Des mesures doivent être prises pour diminuer le coût à charge des personnes âgées sans diminuer la qualité de l’accueil et du service et sans hypothéquer les conditions de vie ultérieures. Il est primordial de maintenir les capacités de maintien des investissements nécessaires à venir.

Derrière tous ces problèmes, de qualité d’accueil, de taux d’encadrement, de formation et de tarifs, se pose bien évidemment le problème du financement de ces structures.

Le financement de la réponse à la dépendance

Actuellement, les frais liés à la perte d’autonomie sont en partie compensés par l’APA, sachant que les soins liés à la maladie sont pris en charge par l’assurance maladie. L’APA est insuffisante et inégalitaire. Insuffisante, parce que le reste à payer est beaucoup trop important. Inégalitaire, puisqu’elle varie d’un département à l’autre. La perte d’autonomie doit être prise en charge par la solidarité nationale. La création d’un nouveau risque géré par la sécurité sociale, le risque « perte d’autonomie », est donc indispensable. Les organisations syndicales de retraités revendiquent la création d’un droit universel de compensation pour l’autonomie quel que soit l’âge, financé dans un cadre de solidarité nationale.

Le recours à des assurances individuelles et au patrimoine des personnes âgées ne sont pas des solutions acceptables car elles pénalisent les personnes âgées dépendantes au détriment d’une solidarité large.

La gouvernance

La CNSA (Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie) s’est imposée comme financeur dans l’accompagnement de la perte d’autonomie.
La CNSA fournit des outils de formation et de gestion aux conseils généraux et aux structures intervenant dans le secteur. Les organisations syndicales demandent que la CNSA garantisse l’égalité de traitement sur tout le territoire et pour l’ensemble des dossiers.

D’autre part, la totalité des fonds gérés par la CNSA doit être utilisée. Les plans départementaux gérontologiques doivent prendre en compte, de façon prioritaire, les problèmes liés à la perte d’autonomie.

Des projets inquiétants

Alors que l’écart ne cesse de grandir entre les intentions officielles et la réalité des politiques menées, diverses idées inquiétantes ont été émises ces dernières années. Les organisations syndicales de retraités s’opposent à des projets tels que :
 la fusion des aides et des moyens existants en un seul dispositif dégressif selon les revenus ;
 la mise en place d’un système de gage patrimonial ayant une incidence sur le taux de prestations, selon l’acceptation ou pas de cette démarche ;
 l’abandon de l’APA avec son remplacement à terme par une assurance privée obligatoire.
 l’abandon de la convergence entre handicapés et personnes âgées en perte d’autonomie définie par loi de février 2005 ;
 certaines propositions visant à faire diminuer le prix journalier de l’hébergement et comportant des risques pour la qualité de l’accueil à l’avenir ;
 le coût croissant supporté par les familles qui sont déjà largement sollicitées.

Ce que veulent les organisations syndicales de retraités

Les organisations syndicales de retraités CFDT, CFE-CGC, CGT, Unsa et FGR-FP demandent à l’État de prendre ses responsabilités par une réponse publique correspondant à un choix de société. En effet, le nombre croissant de personnes en perte d’autonomie est un enjeu de société.

Parce que ce risque peut frapper chacun de nous :
 la réponse passe par une gestion collective de ce risque au sein de la Sécurité sociale ;
 son financement doit se faire dans le cadre de la solidarité nationale, avec un engagement de l’État.