UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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Retraite anticipée des travailleurs handicapés et sa réglementation complexe


La retraite anticipée espérée par de nombreux travailleurs handicapés relève du parcours du combattant tant la règlementation est complexe, les informations insuffisantes ou les conditions restrictives. Cet article complète la fiche n°10 de notre guide des pensions de retraite. Il précise la portée des textes légaux et règlementaires et donne notre analyse sur les difficultés rencontrées par les assurés en situation de handicap.

La réforme de 2023

Comme expliqué fiche 10 du guide des retraites, l’accès à la retraite anticipée des travailleurs handicapés est assouplie depuis septembre 2023. La loi a supprimé la condition de trimestres validés pour ne garder que la durée d’assurance cotisée concomitante au handicap. Le taux d’incapacité de 80 % a été abaissé à 50% pour bénéficier d’une reconnaissance rétroactive nécessaire pour saisir la commission nationale ad hoc au moment du départ à la retraite.

L’âge de départ possible reste à 55 ans et les durées d’assurance cotisées en fonction de l’âge de départ requises n’ont pas été modifiées.

Justifier du taux de 50% applicable depuis janvier 2016

Un arrêté du 24 juillet publié le 8 août 2015 a listé les pièces justificatives et les bénéficiaires recensés (outre quelques dispositions particulières) sont : « 
 Les assurés disposant de la carte d’invalidité délivrée justifiant d’un taux d’incapacité permanente égal ou supérieur à 80%, par décision des organismes, instances ou autorités suivantes : la commission départementale d’éducation spéciale, la commission d’admission à l’aide sociale, la Cotorep, la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, le préfet de département, la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, les services des anciens combattants du Ministère de la Défense (carte d’invalidité militaire).
 Les bénéficiaires de la décision de la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) accordant le taux d’incapacité de 50% ouvrant droit à l’Allocation d’Adulte Handicapé et la carte mobilité inclusion, mention invalidité, délivrée à compter du 1er janvier 2017
 Les travailleurs handicapés dans la catégorie C (avant mars 2007).
 Les titulaires d’une pension d’invalidité de 2ème et 3ème catégorie de l’assurance maladie.
 Les assurés disposant d’un taux d’incapacité permanente (IPP) d’au moins 50 % en raison d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle.
 Les titulaires d’un taux d’incapacité permanente de 44 % sur la base du barème du « concours médical » retenu par le médecin expert ou l’examinateur lors de l’évaluation médication dans les décisions juridictionnelles ou transactionnelles
 Les « Grands invalides civils » titulaires de la carte d’invalidité.
 Les titulaires de la carte de stationnement pour personnes handicapées titulaires de la carte d’invalidité délivrée pour les périodes antérieures au 1er janvier 2006
 Les usagers des établissements et services d’aide par le travail avec mention de l’aide accordée sur la fiche de paie.
 Les bénéficiaires de décisions des juridictions de première instance, d’appel ou de cassation sont acceptées si elles accordent à l’assuré les allocations ou les cartes susvisées ou si elles les lui refusent mais font état d’un taux d’incapacité permanente d’au moins 50 %. »

L’assuré qui ne dispose pas de la totalité des pièces justificatives nécessaires pour attester :
 soit de son incapacité permanente au taux de 50 % ;
 soit de la qualité de travailleur handicapé,
s’adresse au secrétariat de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, la CDAPH (en pratique la Maison départementale des personnes handicapées - MDPH). Au vu des pièces disponibles de son dossier, elle lui fournit des duplicatas de décisions ou, le cas échéant, une attestation signée par le président de cet organisme précisant la ou les périodes de reconnaissance du handicap.

Commentaires CFDT Retraités

Depuis janvier 2016, les assurés en situation de handicap doivent justifier d’un taux d’incapacité de 50%. Toutefois, le critère de la qualité de travailleur handicapé a été maintenu pour les périodes antérieures au 1er janvier 2016. Par conséquent, seules les périodes de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé limitées au 31 décembre 2015 peuvent être retenues.

La complexe justification du taux d’incapacité de 50%

De nombreux assurés en situation de handicap ne sont pas en mesure de justifier de leur taux. La règlementation est complexe. En toute logique, la MDPH devrait fournir le taux. Pas si simple. Dans ce maquis de complexité administrative : « On obtient la détermination du taux à travers une demande de carte de mobilité inclusion ou d’AAH. Si la situation personnelle ne justifie pas la demande. La notification du refus sera motivée et précisera le taux d’IP.

Attention : ces décisions de refus des organismes sont valides pendant un an pour l’appréciation de la condition de concomitance de la situation de handicap et de la durée d’assurance. Autrement dit, la demande doit être renouvelée tous les ans.

Les attributions RQTH faites avant le 1er janvier 2016 de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé peuvent, sur demande de l’intéressé, donner lieu à une évaluation de son incapacité permanente par la MDPH.

La demande de reconnaissance rétroactive possible

La reconnaissance rétroactive peut se faire pour des périodes lacunaires sans justificatif. L’Assurance retraite semble limiter cette possibilité aux absences de demande de renouvellement de la qualité de travailleur handicapé. Cette interprétation est restrictive au regard des dispositions légales et règlementaires. Elle est contradictoire à la lettre ministérielle du 28 septembre 2017 : « ... un assuré qui justifie de la durée d’assurance totale et cotisée requise, mais qui n’est pas en mesure d’apporter les justificatifs administratifs relatifs à son incapacité permanente sur une partie de cette durée d’assurance, de faire reconnaitre son incapacité au cours de cette période par une commission nationale placée auprès de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav). »

Nous pensons à tous les assurés qui, soit par un handicap de naissance, soit par le fait d’une maladie contractée pendant la jeunesse ou en début de carrière professionnelle, parfaitement intégrés dans l’activité professionnelle, n’ont jamais fait état de leur handicap car rien ne le justifiait avant la réforme des retraites de 2003. Ils se retrouvent aujourd’hui privés d’un droit. Pourtant, ils mériteraient, autant que d’autres, d’y accéder quand, en fin de carrière, l’usure de l’organisme s’ajoute au handicap.

Les modalités de demande de cette rétroactivité sont prévues par la circulaire Cnav : pourra être pris en compte un dossier à caractère médical, sous pli fermé portant la mention « confidentiel - secret médical » et constitué de documents médicaux : notamment de résultats d’examen, compte rendus de consultation, d’intervention, d’exploration ou d’hospitalisation, protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé.

La majoration spécifique travailleur handicapé souvent oubliée

La majoration a pour objet de pallier les effets de la proratisation de la pension anticipée pour les assurés ne réunissant pas la durée d’assurance ouvrant droit à pension entière.

L’Assurance retraite n’indique jamais cette majoration lors de la délivrance d’attestation de droits alors que dans sa propre règlementation, elle indique donner l’information du montant estimatif de la retraite. C’est un élément déterminant pour l’assuré pour le choix de la date d’effet de sa retraite.

Cette majoration n’est pas traitée par informatique. Elle est intégrée manuellement dans le montant des droits personnels lors de la notification de retraite. Une erreur humaine est donc toujours possible, la prudence oblige l’assuré à vérifier en reconstituant son calcul. Par contre, à la réception de cette notification et si la majoration n’est pas incluse dans les droits personnels, un recours s’impose. Pour rappel, le montant de la retraite majorée ne peut être supérieur au montant de retraite que l’assuré aurait perçu s’il avait justifié de la durée d’assurance requise.

Gilbert Jérôme