Un nouveau traité plus compliqué que simplifié
Dans le nouveau projet de traité, réformateur remplace constitution. Mais la charte des droits fondamentaux, exigée par les syndicats européens, reste accrochée au nouveau projet.
Le Conseil européen de juin dernier a élaboré laborieusement un mandat à la conférence intergouvernementale qui va écrire un nouveau projet de traité baptisé réformateur. S’il fallait encore le démontrer, cela prouve que le plan B n’existait pas.
Il faut saluer le courage et la détermination de la Présidence allemande aidée par certains Etats membres dont la France, l’Espagne, le Luxembourg pour bâtir un compromis basé sur le projet de traité constitutionnel. N’oublions pas que 18 Etats membres sur 27 l’avaient déjà ratifié.
Quelles sont les principales modifications acceptées par les 27 ? Le terme de « constitution » disparaît. Les références symboliques de l’Union, pourtant claires et utilisées au quotidien, disparaissent (drapeau, hymne, devise). L’élection pour deux ans et demi d’un président de l’Union est confirmée. Le rôle des Parlements nationaux se renforce pour l’examen des projets de textes qui restent appelés « directives ou règlements » à la place de « lois ». Le Parlement européen voit la procédure de co-décision avec le Conseil étendue à de nouveaux domaines.
L’unanimité reste en politique étrangère, sécurité sociale, fiscalité et culture
A compter de 2014, la Commission se compose d’un nombre de commissaires égal aux deux tiers du nombre d’Etats membres avec rotation égalitaire ! C’est aussi en 2014 (voire en 2017) que la double majorité pour la prise de décision s’exercera (55% des Etats membres représentants au moins 65% de la population). La majorité qualifiée devient la règle pour 51 domaines supplémentaires dont la coopération judiciaire et policière, l’éducation ou la politique économique. L’unanimité reste requise pour la politique étrangère, la sécurité sociale, la fiscalité et la culture.
La France et les Pays-Bas obtiennent l’ajout d’un protocole soulignant l’importance des services d’intérêt général et mentionnant « le rôle essentiel et la grande marge de manœuvre des autorités nationales, régionales et locales ».
La notion de concurrence libre et non faussée ne figure pas dans ce projet de traité mais comme elle existe au moins douze fois dans le traité de Rome, elle sera dans tous les cas juridiquement applicable.
Maintien de la Charte des droits fondamentaux
La Charte des droits fondamentaux est maintenue de même que le droit d’initiative citoyenne. Pour la Confédération européenne des syndicats (CES) « le maintien de la Charte des droits fondamentaux est le test critique que nous nous étions fixé pour évaluer le succès ou l’échec des négociations lors du Conseil européen ». Toutefois, « la CES déplore que le Royaume-Uni ait refusé les droits sociaux européens pour les travailleurs britanniques » et la CES « souhaite que cette décision soit rectifiée le plus rapidement possible. » Si la route pour poursuivre la construction européenne est bien ré-ouverte, une grande vigilance et l’action syndicale s’imposent.
Ce nouveau traité plus compliqué que simplifié mérite toute l’attention des citoyens et citoyennes que nous sommes. Nous devons exiger transparence et débats au fur et à mesure que les travaux vont avancer. Car nous refuserons que l’Europe poursuive sa construction sans nous.
Lexique
Conseil européen : chefs d’Etat ou de gouvernement plus le président de la Commission européenne.
Conférence intergouvernementale (CIG) : représentants des 27 Etats membres et trois du Parlement européen.
Calendrier prévu
En octobre 2007 la CIG doit se conclure par un accord entre les dirigeants de l’Union sur le texte final du traité réformateur. Fin 2007, fin des travaux de la CIG. Juin 2009, élection du Parlement européen au suffrage universel. Avant cette élection, tous les Etats de l’Union auront dû ratifier le nouveau traité.