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Victor Hugo et l’Année terrible


L’Année terrible est le titre que choisit Victor Hugo pour un recueil de poèmes dans lesquels deux évoquent les événements tragiques que vient de traverser la France, la guerre de 1870 et la Commune de Paris. Le poète est aussi un homme politique qui affirme ses engagements républicains, pacifistes et européens.

Quand Louis-Napoléon prend le pouvoir en 1851, Hugo désavoue farouchement le coup d’État. Condamné au bannissement, il se réfugie dans les îles anglo-normandes, où il restera jusqu’à la chute de l’Empire. Mais de son exil, le proscrit continue de faire entendre sa voix. Pendant cette période, il écrit Les Misérables, le grand roman des humbles écrasés par l’injustice. Il est le porteur d’un idéal de fraternité. Quand en 1869 a lieu à Lausanne, en Suisse, « le Congrès pour la paix », il est nommé président honoraire. De Guernesey, il envoie le discours d’ouverture, texte repris dans toute la presse et au retentissement européen. Il fustige les conflits : « la guerre est mauvaise, le sang humain précieux ».

Et avec un siècle d’avance, en rupture complète avec le nationalisme de son temps, Hugo le visionnaire imagine une Europe unie : « Un jour viendra où l’on verra ces deux groupes immenses, les États-Unis d’Amérique et les États-Unis d’Europe placés l’un en face de l’autre se tendre les mains par-dessus les mers… » Mais la guerre franco-prussienne de 1870 éclate un an plus tard.

Hugo le patriote

Après la capitulation de Napoléon III, la République est proclamée le 4 septembre 1870. Le lendemain, Victor Hugo arrive à Paris, après dix-neuf ans d’exil, sous les acclamations d’une foule enthousiaste. Son engagement dans le conflit est total et s’il rappelle que ce sont les empereurs qui ont fait la guerre dont souffrent les deux peuples, il participe activement à la défense de la capitale et il reste à Paris pendant le siège. En 1871, il est élu député de la Seine et va s’opposer vigoureusement aux conditions de paix proposées par Adolphe Thiers, le chef du gouvernement, qui sacrifie l’Alsace et la Lorraine. Mais les députés républicains, dont il fait partie, sont peu nombreux dans une Assemblée majoritairement monarchiste. Peu de temps après, empêché de parler lors d’un débat, il démissionne.

Hugo l’humaniste

Le jour où la Commune éclate, Hugo est aux obsèques de son fils Charles, brutalement décédé. Et il n’est plus à Paris pendant la révolte populaire mais à Bruxelles où résident la veuve de son fils et ses deux petits-enfants. C’est de Belgique qu’il suivra la révolte des Communards. Le poète est proche de leurs idéaux et correspond avec Louise Michel. En 1850, la jeune fille âgée de 20 ans admiratrice fervente du grand écrivain lui a adressé de nombreux poèmes et de longues lettres. Le poète lui a répondu et ils se sont rencontrés plusieurs fois. La correspondance entre la pasionaria de la Commune et le républicain engagé durera 30 ans. Hugo parle de la Commune comme « une bonne chose mal faite », il déplore la violence de cette guerre civile, les fusillades, les destructions, mais il prend la défense des vaincus et soutient Louise Michel emprisonnée. Il écrit un poème pour lui rendre hommage : « Viro Major » (« plus grande qu’un homme » en latin).

Cette défense des Communards suscite la réprobation, sa maison à Bruxelles est lapidée et il est expulsé de Belgique. Quelques années plus tard, fidèle à son idéal de fraternité, Hugo, élu au Sénat, continue de réclamer aux sénateurs l’amnistie des Communards emprisonnés et déportés. « La clémence est la fin des colères et des haines… Messieurs, ce que vous devez à la France, ce que la France attend de vous, c’est un avenir apaisé. »
Françoise Berniguet

La Chroniqu e illus trée, CC 0 Par is Mus ées / Maisons de Victor Hugo Par is-Guernesey