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Notre dossier Europe


Vues d’Europe, les élections européennes


Retour sur les élections dans l’Union européenne de juin 2024. Les 720 eurodéputés élus comportent une spécificité qui rend difficile l’analyse des résultats. Les enjeux se concentrent plus sur chaque pays que sur l'Europe.

Globalement, ces élections se caractérisent par une stabilité pour les deux grandes familles politiques, des reculs pour les formations libérales et écologistes et une percée de l’extrême droite nationaliste. Cette poussée est significative en France, en Allemagne ainsi qu’en Italie, mais elle est en recul dans les pays d’Europe du Nord.

Quelques enseignements des élections au plan européen

Globalement, elles n’ont pas entraîné de bouleversements majeurs pour les deux principaux groupes. Le Parti populaire européen et Socialistes et démocrates (S&D) vont retrouver, chacun, à peu près le même nombre de députés que dans la mandature précédente.

En revanche, deux autres groupes, également favorables à l’Union européenne, ont subi des déconvenues. Le groupe Renew, libéral, va passer de 102 députés en 2019 à 80 en 2024. Ce recul est dû à un score médiocre en France de la liste de la « majorité présidentielle » et au faible score en Allemagne du Parti libéral-démocrate (FDP) qui représente la coalition gouvernementale. L’autre parti politique, favorable à l’Europe, le groupe des Verts, a subi un revers, passant de 71 députés en 2019 à 53 en 2024 dû au contrecoup de l’offensive conjointe des agriculteurs et de la droite européenne contre le Pacte vert et la transition écologique.

Du côté des eurosceptiques, on constate la progression des deux groupes qui représentent cette mouvance au Parlement européen. Le groupe Identité et Démocratie (ID) passerait de 49 à 58 députés. Ce groupe, piloté par le Rassemblement national (RN), se caractérise par une grande méfiance à l’égard des institutions européennes, et propose des mesures qui visent à détricoter les traités. Il est proche des positions russes.

Le groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR) passerait de 69 à 73 députés. Il est piloté par le parti Fratelli d’Italia (FD) de la présidente d’extrême droite du Conseil italien, Georgia Meloni qui, dans son pays, a remporté les élections en recueillant 28,9 % des voix. Ce groupe est favorable à l’Europe, même s’il veut en changer le cours, en particulier sur les questions migratoires. Il apporte son soutien à l’Ukraine et il est favorable à l’Otan.

Entre ces deux groupes, s’il existe des divergences sur le plan international et une rivalité pour le leadership entre Marine Le Pen et Georgia Meloni, un risque d’entente entre ECR et ID n’est cependant pas totalement à exclure.

Enfin, on notera que l’extrême droite est arrivée en tête de ce scrutin en France, en Italie, en Autriche et en Hongrie. Les pays fondateurs de l’Union européenne, à l’exception du Luxembourg, ont connu des poussées de ce courant politique nationaliste lequel est cependant en recul dans les pays d’Europe du Nord.

Les suites de ces élections sont attendues dans plusieurs domaines

La constitution des groupes politiques au Parlement européen (PE) est prévue au plus tard pour le 15 juillet. Aussi, les chiffres énoncés dans cet article, pour chacun des groupes, sont provisoires et susceptibles d’ajustements.

La sélection pour la nomination dans les « top jobs » de l’UE, Président·e de la Commission, Haut·e représentant·e de l’Union pour les affaires étrangères, Président·e du Conseil européen, sera abordée par les chefs d’État et de gouvernement lors de deux Conseils européens les 17 juin puis les 27 et 28 juin.

La séance constitutive du Parlement européen est programmée du 16 au 19 juillet. Elle devra élire son Président ou sa Présidente, les vice-présidents et questeurs du PE. Lors de la séance des 16 et 19 septembre aura lieu l’élection du ou de la Présidente de la Commission, et les 16 et 19 décembre se tiendra le vote d’investiture de la Commission par le Parlement européen.

Dans cet agenda chargé, il ne faut pas négliger les résultats des élections législatives en France le 7 juillet et la constitution du nouveau gouvernement qui en découlera.

Quel programme de travail pour la Commission et le Parlement européens ?

Difficile, en l’absence d’informations précises, d’en voir les contours exacts. Ce programme dépendra aussi des alliances qui seront constituées, en début de mandat, entre les trois ou quatre groupes pro-européens.

Cependant, on peut indiquer, sans grand risque d’erreur, quelles sont les principales pistes de travail à venir :
 les moyens financiers de l’UE demeureront-ils à budget constant ou intégreront-ils de nouvelles ressources, telles que les taxes sur les grandes fortunes, sur les transactions financières ?
 la poursuite voire l’amplification du soutien à l’Ukraine ;
 les voies et moyens d’une compétitivité européenne retrouvée au regard, notamment, des mesures protectionnistes prises tant par la Chine que par les États-Unis ;
 la construction de l’Europe de la Défense, rendue nécessaire par la politique impérialiste de la Russie et par le désengagement possible des États-Unis ;
 l’avenir du Pacte vert, poursuite ou abandon ;
 les questions migratoires, épines d’une coordination européenne à la peine sur le sujet ;
 l’élargissement avec le passage, en théorie, de 27 membres à 36, à terme. Un sujet difficile comportant de nombreuses implications, comme la reprise de l’acquis communautaire, le respect de l’état de droit, les institutions européennes à modifier.

Ces sept questions ne sont sans doute pas exhaustives, mais elles indiquent que l’approche géopolitique prévaut désormais. Cela devra s’accompagner de la prise en considération des aspects sociaux et de l’implication des acteurs de la société civile, sinon le risque est grand de voir l’extrême droite et les nationalistes se renforcer encore au détriment de l’Europe.

(Jean-Pierre Moussy

« Nous avons besoin de plus d’Europe », déclare la CFDT

Le 10 juin, la CFDT a relevé le score historique de l’extrême droite en France. « À l’heure où des défis majeurs doivent être relevés, où le réchauffement climatique bouleverse les équilibres environnementaux, économiques et sociaux ; à l’heure où les inégalités affaiblissent la cohésion sociale, où le rapport au travail est transformé par de nouvelles aspirations, c’est une très mauvaise nouvelle pour les travailleuses et les travailleurs. Nous avons besoin de plus d’Europe. De plus d’Europe sociale, de plus d’Europe écologique, de plus d’Europe démocratique. »