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Ehpad : la Défenseure des droits alerte sur cinq points


Devant l’absence de réponse sur les dysfonctionnements dans les Ehpad, la Défenseure des droits a relancé les pouvoirs publics en mettant l’accent sur cinq questions à résoudre d’urgence. Par ailleurs, un rapport du Haut-Commissariat au plan présente des solutions pour l’habitat des seniors et pour l’Ehpad de demain.

« Pas à la hauteur ! » Ce commentaire de Claire Hédon, la Défenseure des droits, qualifiait à la mi-janvier la réponse des pouvoirs publics sur les droits fondamentaux des personnes hébergées en Ehpad. Les services de la Défenseure des droits avaient présenté 64 recommandations dans un rapport en mai 2021. Dix-huit mois plus tard, les avancées dans ces domaines se font toujours attendre. Le rapport faisait suite à plus de 900 saisines adressées à la Défenseure des droits par des résidents ou des familles de résidents en Ehpad. Aujourd’hui (fin mi-mars), le nombre de saisines a atteint plus de 1 200. Pourtant, ces mêmes autorités s’étaient montrées « sensibles aux constats et aux recommandations » du rapport et s’étaient même engagées « à prendre des mesures. »

La Défenseure ne désarme pas pour autant. En janvier, Claire Hédon a relancé son alerte avec cinq actions à mener dans les plus brefs délais. Elle a d’abord rappelé l’urgence d’un ratio minimal d’encadrement de personnel soignant. La Défenseure estime que « le droit à l’accompagnement individualisé et adapté est compromis par le manque de moyens humains et financiers des établissements. » Le nombre de soignants est actuellement de six pour dix résidents contre dix pour dix résidents dans les pays du nord de l’Europe. Le rapport préconise de passer à huit soignants. Ce ratio permettrait, selon la Défenseure, « une amélioration de la prise en charge des résidents et des conditions de travail des professionnels en redonnant de l’attractivité à ces métiers ».

Liberté de circuler et maltraitance

Deuxième point d’alerte : les violations de la liberté de circuler. La crise du Covid-19 a eu « des répercussions négatives sur les droits et libertés des résidents et de leurs proches. » Un important nombre de saisines, parmi les 1 200, portent sur ce sujet. Malgré la levée des restrictions sanitaires, La Défenseure des droits continue d’être saisie pour « des situations d’isolement arbitraire des résidents dans leur chambre, sur décision unilatérale de l’établissement et en dehors du cadre de protection prévu réglementairement ». Claire Hédon a rappelé que « les résidents ne peuvent subir de restrictions à leurs droits fondamentaux plus importantes que le reste de la population. »

Troisième point et non des moindres, la Défenseure appelle à la mise en place « d’un dispositif de vigilance médico-sociale pour renforcer l’identification, le signalement et l’analyse des situations de maltraitance. » Selon elle, « les professionnels se heurtent toujours à des difficultés pour signaler des actes de maltraitance ».

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Restaurer la confiance dans le système

La Défenseure des droits observe que « les inspections réalisées par les agences régionales de santé (ARS) et les conseils départementaux ne disposent pas de référentiel commun comme base de contrôle. [Elle] rappelle que les contrôles réalisés par les ARS doivent être réalisés sur place, de manière inopinée et en lien avec les conseils départementaux. »

Enfin dans l’objectif de restaurer la confiance, le rapport préconisait la mise en œuvre d’un dispositif de médiation afin de prévenir les conflits. Le ministère de la Santé avait pris l’engagement de publier dix indicateurs clés sur chaque établissement. La Défenseure des droits attend toujours cette publication et demande « qu’un plan d’action soit engagé à bref délai tant sur la place des personnes âgées vulnérables […] que sur les ressources […] pour que les personnes accueillies en Ehpad soient traitées sans discrimination et avec dignité ».

[Didier Blain

Prévenir et agir, les missions de l’Ehpad de demain

Les dysfonctionnements soulevés dans Les Fossoyeurs ont largement terni l’image des Ehpad. Ces établissements hébergent aujourd’hui plus de 700 000 personnes âgées et le nombre des 85 ans et plus va exploser à partir de 2030. Même si la plupart des personnes souhaitent vieillir à domicile, cette option n’est pas raisonnable pour toutes les personnes en perte d’autonomie.

Dès 2021, le think tank Matières Grises a publié une étude sur l’Ehpad du futur. L’Ehpad doit évoluer et s’inscrire dans les territoires avec une fonction de plateforme de services et de soins ouverte à la population. Ainsi, l’Ehpad de demain aura un rôle de prévention et cette plateforme de services et d’accueil lui permettra de s’inscrire dans un paysage plus familier et d’estomper l’opposition entre domicile et établissement. L’Ehpad de demain deviendra lieu de vie et non plus lieu de résidence.
[Nicole Chauveau

Repenser l’habitat pour les baby-boomers

« Tout doit être repensé, de la philosophie qui sous-tend la façon dont sont reçues les personnes âgées à l’architecture des lieux [les Ehpad], de la qualité des services proposés aux respects des droits et de l’intimité de la personne en passant par l’implication maximale des familles et des proches », affirme le rapport du Haut-Commissariat au plan et du cercle de réflexion Matières Grises publié en février dernier. Ce rapport part du constat suivant : la génération 1968 aura 80 ans en 2030 et comptera cinq millions d’individus. Comment vont-ils réagir face à la dépendance ? Ils ont trois possibilités : rester chez soi, se trouver un autre chez soi ou vivre en Ehpad.

Aujourd’hui, les retraités anticipent l’évolution de leur habitat. Ce qui se traduit par le succès des résidences services seniors dont 75 % des résidents sont des femmes, valides, veuves, âgées de 80 ans et plus. Mais aussi par le développement de formules alternatives comme les habitats inclusifs, les résidences intergénérationnelles, le béguinage, etc. Les seniors déménagent aussi de plus en plus souvent de leur pavillon situé en périurbain vers des lieux de centralité dotés de commerces, de transports et de services publics.

Dans l’attente d’une loi Grand âge, chaque territoire doit avoir un plan d’action face au vieillissement, préconise le rapport. Le département doit devenir le point de départ des actions d’adaptation de la société au vieillissement et devrait réaliser tous les trois ans un schéma départemental de la transition démographique.
[Danielle Rived