Face aux populismes et au racisme
Du populisme et ses idées simples au rejet de l’autre et au racisme, le pas est vite franchi. Les valeurs républicaines sont en jeu. Le courage de réagir et de mener le débat s’impose.
« Attachées à une société démocratique où les valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité ont un sens ; attachées à les faire vivre au quotidien dans les entreprises et les services publics », les organisations syndicales CFDT, CFTC, CGT, FSU, Solidaires, UNSA ont chacune signé l’appel à manifester le 30 novembre dernier. Pour elles, « le racisme, sous quelque forme qu’il s’exprime, est intolérable ».
Pour l’historien Pierre Rosanvallon, « on assiste à une montée en puissance des sentiments protectionnistes accompagnés de xénophobie […]. Il s’agit d’une culture du rejet… On doit s’atteler à la résolution de la question sociale et redonner un cadre rénové à la vie démocratique ». De son côté, Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT, insiste sur la crise des responsabilités. « Trop d’acteurs disent “ça ne va pas”, mais rejettent la responsabilité sur le voisin et ont du mal à agir. »
Le racisme est la partie la plus criante qui menace la démocratie. Les actes récents, notamment contre la ministre de la Justice, l’illustrent. Mais il faut aussi relativiser cette tendance. « En 30 ans, notre pays est devenu beaucoup plus tolérant », précise Vincent Tibertj qui a conduit plusieurs recherches à partir d’enquêtes d’opinion (1). L’histoire des démocraties nous rappelle cependant les dangers d’un retour en arrière lors des crises économiques et sociales.
Débattre et démonter les idées reçues
Face à ces menaces à l’œuvre dans toute l’Europe, comment faire preuve de pédagogie contre tous les clichés et revivifier notre démocratie ? En s’appuyant sur les valeurs de la CFDT, il s’agit de valoriser les avancées et d’éclairer les objectifs sociaux.
Pour lutter contre le « tous pourris », ça vaut la peine d’expliquer le travail des élus, ce qu’ils font réellement sur le plan local et national. C’est s’extraire des stéréotypes qui limitent le rôle des élus politiques aux seuls débats de l’hémicycle. Il en est de même pour le syndicalisme toujours représenté à travers la manifestation ou la grève, alors que l’activité quotidienne est tout autre. Il s’agit aussi de préciser comment notre démocratie fonctionne, l’utilité de l’impôt progressif, le financement de l’action publique et de la protection sociale.
C’est encore faire attention aux mots et à leur signification. La méconnaissance des autres et l’absence de liens sociaux entraînent des rejets. Par exemple, « musulman » et « islamiste » n’évoquent pas la même chose. D’où l’importance de saisir des occasions de découvrir autrement ceux qui sont perçus comme différents, en les faisant participer à des manifestations sportives ou culturelles, à une fête des voisins, pour faire évoluer des perceptions.
C’est enfin prendre au sérieux le désarroi des individus provoqué par la crise, les inégalités, le chômage, la peur de l’avenir, la complexité des problèmes ou une agression personnelle qui entraînent tous les amalgames possibles.
Sans être d’accord avec les citoyens qui font preuve d’exclusion ou de racisme, on doit les entendre, les comprendre. L’important est de mener la discussion, de progresser dans l’échange, de démonter les idées reçues à partir de la réalité et des argumentaires (2). La culture et le courage du débat sont à retrouver.
Jacques Rastoul
(1) Des votes et des voix, ouvrage collectif dirigé par Vincent Tiberj, éd. Champ social.
(2) En finir avec les idées fausses sur les pauvres et la pauvreté ?192 p. - 5 € - Coédition éditions de l’Atelier & éditions Quart Monde et www.atd-quartmonde.fr/Le-manuel-anti-idees-recues-deja.html
Le faux nouveau FN. www.cfdt.fr/portail/confederation/palette/outils/nos-argumentaires/argumentaire-le-faux-nouveau-fn
Le bon sens près de chez nous
Ce qu’en disent les retraités de l’Union locale CFDT des retraités de Juvisy.
« Les gens ne s’intéressent pas aux programmes précis des partis politiques. Ils veulent que ça aille mieux pour eux, sans réfléchir plus. »
« Dans la campagne présidentielle, on n’a parlé que de la France, peu ou pas de l’Europe, des pays émergents et du reste du monde. Pourtant notre avenir en dépend aussi. »
« Les bonnes relations qui existent entre les « Français de souche » et les citoyens d’origine étrangère sont rarement mises en avant. »