UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

Stats et études


L’échange et la confiance en attendant mieux


Le plus souvent regroupés en coopératives, un million et demi de producteurs sont les vrais acteurs du commerce équitable. Avec leurs familles, réparties dans 59 pays d'Afrique, d'Asie, et d'Amérique latine, 8 millions de personnes provoquent un nouveau mode d'échanges entre producteurs et consommateurs. Une très forte progression du marché équitable, qui ne représente pourtant que 0,1 % du commerce mondial.

Dans le monde, les produits labellisés « commerce équitable » ont totalisé un chiffre d’affaires de près de 3 milliards d’euros, soit une progression de 22% en deux ans. En France, les produits du commerce équitable génèrent 256 millions d’euros d’achat. Un doublement en 3 ans. 2 800 produits labellisés sont commercialisés par plus de 180 entreprises.

Parmi les plus vendus : le café 33%, le coton 16%, la banane 11%, le cacao 10%, le thé 9%.

Les tablettes de chocolat représentent 1% de part de marché en grande distribution et seraient en croissance de 70% !

Depuis une dizaine d’années, la quinzaine du commerce équitable avec ses conférences de presse, ses colloques et la valorisation des rayons dans les grandes surfaces se déroule début mai. On compte, pour l’occasion, jusqu’à 3 000 manifestations dans notre pays.

Les trois dimensions

Si l’on croise ce souci du commerce équitable avec le développement durable, le respect de la nature, la prise en compte des difficultés de vie des pays émergents, on comprend mieux pourquoi ce type de commerce a le vent en poupe auprès des consommateurs et citoyens français et européens. Beaucoup y adhèrent.

La loi du 2 août 2005 donne une définition du commerce équitable : « Il organise des échanges de biens et de services entre des pays développés et des producteurs désavantagés situés dans des pays en développement. Ce commerce vise à l’établissement de relations durables ayant pour effet d’assurer le progrès économique et social de ces producteurs. »

On peut dégager trois dimensions complémentaires et indissociables du commerce équitable :
 une dimension socio-économique par des échanges commerciaux équitables inscrits dans le développement durable ;
 une dimension relationnelle pour d’autres modes d’échanges commerciaux basés sur la confiance et la transparence ;
 une dimension politique avec un engagement pour plus de justice dans les règles du commerce international.

L’irruption des labels

Jusqu’à la fin des années 80, le commerce équitable était confiné dans des boutiques des centres-villes et les marchés ou foires de certaines localités. Des bénévoles venaient aussi proposer des produits dans des stands de congrès. Ce système a toujours cours aujourd’hui, notamment avec « Artisans du monde » qui propose une grande variété de produits artisanaux, souvent uniques puisque fabriqués à la main.

Pour que le commerce équitable ne reste pas dans sa bulle, il était nécessaire de différencier les produits artisanaux des purs produits alimentaires, pour lesquels la production se développe à mesure que les consommateurs deviennent plus nombreux. Mais pour l’information du consommateur, une étiquette ne suffit pas. Pour être crédible un produit issu du commerce équitable doit le prouver.

C’est ainsi qu’en 1988 le premier label Max Havelaar a vu le jour. Un cahier des charges établi avec les parties concernées, définit des critères à respecter. Parmi ceux-ci, les producteurs perçoivent bien le revenu de leurs produits. Le prix minimum garanti couvre les coûts d’une production durable et le versement d’une prime de développement aux organisations certifiées qui pourront affecter les sommes dégagées à des investissements structurels comme, par exemple, la création d’écoles ou de centres de santé, ou l’achat de terres…

Le doute plane encore

L’étape déterminante prise par le commerce équitable est évidemment due à son entrée partielle dans les grandes et moyennes surfaces qui en sont devenues ces dernières années des partenaires indiscutables.

Mais à ce niveau la situation se complique. Si les consommateurs donnent un coefficient de sympathie de plus de 80% au commerce équitable, ils trouvent plutôt bien de disposer de ces produits en grandes surfaces. En même temps, ils s’interrogent sur les réelles intentions de ces magasins. Comment en effet concevoir que ces grands groupes, dont l’objectif est de faire un profit maximal, puissent modifier fondamentalement leurs pratiques au point de développer, à travers le commerce équitable, un volet social à l’échelle mondiale ? Quelle part les grandes et moyennes surfaces se gardent-elles pour commercialiser les produits du commerce équitable ?

Tout n’est donc pas encore totalement gagné. Quelques imperfections subsistent. Les prix, pas toujours mais parfois un peu plus élevés, restent un facteur de blocage. Mais le plus important est ailleurs. La grande diversité des organismes qui gèrent le commerce équitable complique en effet un peu les choses d’autant que certaines marques n’appartiennent nullement à cette famille et cherchent à profiter de « l’occase » pour s’y engouffrer avec des titres ambigus qui embrouillent le consommateur.

Quant aux labels eux-mêmes, le plus connu, Max Havelaar, reste encore opaque. Le fait de rester privé, sans garantie des pouvoirs publics, laisse planer un doute sur ce qui se passe dans les pays en voie de développement, sur les transports des marchandises…

Pourtant l’évolution structurelle et en volume de ce type de commerce, indéniablement plus social que le commerce traditionnel, nous incite à le soutenir très favorablement, à jouer la confiance, en attendant mieux.

Georges Goubier