UNION CONFÉDÉRALE CFDT DES RETRAITÉS

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Terrorisme, laïcité, niveau scolaire, où en est l’école ?


Les retraités sont souvent aussi des grands-parents qui s’inquiètent de qui se passe dans l’école de leurs petits-enfants. Nous avons interrogé à ce sujet Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du Sgen-CFDT.

Fil Bleu. Le constat est très alarmant : deux professeurs assassinés, des professeurs menacés ou qui enseignent la peur au ventre. Dans quel état d’esprit est le Sgen-CFDT face à cette situation ?

Catherine Nave-Bekhti. L’assassinat de Dominique Bernard, trois ans après celui de Samuel Paty, par un jeune fanatisé se réclamant du terrorisme islamiste, ravive une blessure pour tous les personnels des établissements scolaires. Ces assassinats jettent le trouble dans la relation éducative parce qu’à Arras, c’est un ancien élève qui blesse et tue, à Conflans-Sainte-Honorine, des élèves et parents ont alimenté un fanatique jusqu’à lui désigner sa victime. Les collègues enseignants, de vie solaire, de direction, les agents des collectivités locales ont tout cela en tête… et aussi la résolution de continuer à éduquer, à former, contre les obscurantismes, pour contribuer à l’émancipation.
Le Sgen-CFDT a participé aux concertations avec le ministre sur l’amélioration de la protection des personnels et la sécurisation des établissements. Mais pour cela, il faut que l’État et les collectivités locales coopèrent.

Depuis sa fondation en 1937, le Sgen se veut laïque comme l’est l’école en France. Que peut l’école contre le terrorisme islamiste ?

Depuis sa fondation, le Sgen affirme son attachement à la laïcité de l’école et aux valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité. Nous continuons d’affirmer notre attachement à la Charte de la laïcité affichée dans tous les établissements solaires, extraite des deux circulaires rédigées en 1936 et 1937 par Jean Zay, ministre de l’Éducation nationale : refuser « tout militantisme politique, idéologique ou religieux dans l’école » afin que « l’école apprenne à juger par soi-même ». Cela participe d’« une République ouverte, fraternelle, solidaire, qui n’exclut personne en raison de ses origines, de sa religion […], une école qui accueille tous les enfants, quels qu’ils soient, et qui tente de les ouvrir au monde ».
Mais l’école ne peut pas tout. Notre société tout entière doit lutter contre le terrorisme islamiste en s’appuyant sur les valeurs républicaines et les principes démocratiques. Une voie difficile et exigeante, car toute démocratie est fragile face aux coups de boutoirs du terrorisme (quelle que soit l’idéologie qui en est le terreau). Mais si nous abandonnons ces principes, alors nous aurons tout perdu.

Autre sujet d’inquiétude : la baisse du niveau scolaire. Quelle est l’analyse du Sgen sur ce sujet et quelles sont ses propositions pour lutter contre cette dégradation, si toutefois elle est réelle ?

Les études de l’OCDE, l’analyse des évaluations du ministère montrent que notre système éducatif reste très performant pour former de bons élèves, et qu’il peine à faire progresser les élèves rencontrant des difficultés d’apprentissage. Notre système éducatif ne parvient pas suffisamment à réduire les inégalités sociales de réussite scolaire. Ce qui est marquant, c’est le poids des inégalités sociales sur les parcours scolaires.
Les politiques éducatives actuelles ne sont pas bâties pour aborder la question sous cet angle. Pour le Sgen-CFDT, il faudrait repartir de l’avis du CESE intitulé « Une école de la réussite pour tous » et du rapport de l’Unicef « Un nouveau contrat social pour l’éducation », et donner aux enseignants un cadre leur permettant réellement de faire de la différenciation pédagogique.

Entretien réalisé par Annie Kuhnmunch